Je savais que le film sortirait en Imax 3D, mais j'avais pour ma part complètement sous-estimé l'éventualité d'un travail spécifique pour ce format, donc je n'en parlais pas... jusqu'à ce que je voie le truc.
faut arrêter avec les histoires de fête foraine là. Eric Rhomer c'est des films enregistrés sur pellicule et projetés sur une toile blanche. Or ce procédé aussi ça a été de la fête foraine de 1895 aux années 20. Ce genre de réflexion pue un peu le cynisme du Monsieur qui a séparé le grain de l'ivraie, refusant le cinéma en tant que Spectacle pour ne le contempler qu'en tant qu'Aââââârt...Pour ce qui est de la validité d'un discours critique portant sur le film selon les conditions de projection, j'avoue que je suis partagé. Oui bien sûr, si le film est suffisament bon, il supportera une dégradation de son format (donc
Beowulf est bon puisqu'en projection traditionnelle ça marche du tonnerre) et on a tous quelques films chéris découverts sur le plus mauvais support de reproduction du monde, la VHS.
Mais il n'empêche que l'expérience du spectateur pâtit
énormément de ces dégradations, et qu'il ne peut s'en rendre compte avant d'avoir pu juger sur pièce.
Il m'est assez souvent arrivé de dire à des amis que, même s'ils aimaient beaucoup
Lawrence d'Arabie,
Le Cid ou
2001 l'odyssée de l'espace, ils ne pouvaient tout simplement pas réaliser le pouvoir démentiel, hypnotique, de ces oeuvres lorsqu'elles étaient vus dans leurs conditions optimales. J'ai eu la chance énorme de pouvoir les découvrir ainsi, et c'est pourquoi je peux affirmer que les lents mouvements de grue de Lean, les lents travellings avant de Kubrick, les compositions de figurants de Mann, ont d'abord et avant tout été pensés pour le 70mm, où l'oeil du spectateur cherche à s'imbiber du moindre détail à l'écran, où l'immersion n'a pas d'équivalent avec notre actuel 35mm, où l'impression de profondeur de champ est démultipliée, où le regard des comédiens capte la lumière d'une tout autre façon etc. Un long plan fixe de 30 secondes dans
2001 n'a tout simplement plus la même valeur lorsqu'on en fait l'expérience dans ces conditions optimale. Le plan n'est plus "un chouia trop long", il est juste ce qu'il faut.
Un truc qui, à mon avis, parle pour lui-même. J'ai eu ces films chez moi sur tous les supports (vhs, laserdisc, plusieurs éditions dvd). Je ne les ai jamais revus dans leur intégralité alors qu'ils appartiennent à mon panthéon personnel. Et c'est une des raisons pour lesquelles j'ai toujours excusé les gens qui m'avouaient, penauds avec un doigt dans la bouche, qu'ils s'étaient fait chier comme des rats devant
2001 ou même
Lawrence, découverts à la télé. Ces films diffusés sur une télé, c'est une aberration.
J'ai cru comprendre qu'il y avait pas mal de fans du
Narcisse Noir sur ce forum. Imaginez qu'une personne vous en parle un jour comme d'un drame plutôt pal mal, assez intéressant, mais que faut arrêter avec cette mention "chef d'oeuvre". Et puis, au bout de 10 minutes d'échange, vous réalisez que cette personne a découvert
Le Narcisse Noir sur une télé noir et blanc. Franchement, quelle serait votre réaction ? Que le film se suffit à lui-même et puis basta ? Ou bien est-ce que vous tenteriez de convaincre cette personne de revoir le film en technicolor ? Ce technicolor ne fait-il pas partie intégrante de l'expérience de ce film ?
pour l'exemple :
un zoom sur le visage de Lawrence, à comparer avec votre DVD tout pourri. Dans le film, ceci n'est même pas un gros plan, mais en salle et en 70mm comme sur ce cliché, on a bel et bien cette loupiotte au coeur de son iris. A partir de là, vous ne pouvez qu'imaginer le reste des scènes dans le désert.