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Version complète : Scénarios simples ou simplistes ?
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Elego
Beaucoup de gens semblent considérer beaucoup de films incroyablement bien construit scénaristiquement (ou même au niveau de la mise en scène) comme des films simplistes tous juste bon à faire passer un bon moment, là où des scénarios plus "compliqués", moins bien construits (plus ennuyeux) semblent être considérés comme réussis.

On sait très bien que faire un scénario "efficace" est 100X plus compliqué que de faire un scénario bordélique, ça demande beaucoup de travail pour répartir correctement les arcs narratifs, la présentation de l'univers et des personnages, doser intelligemment la quantité d'informations à l'écran, tout en évitant la seule chose impardonnable au cinéma : l'ennui.

Tout ceci rappelle un autre débat, celui des films à succés "populaires" boudés par l'intelligentsia, et les films plus...hermétiques, compliqués...(chiants quoi).

En fait, les scénarios bordéliques donnent l'impression d'être travaillés, parce-que justement on a du mal à y trouver une certaine logique ou une certaine cohérence, donc on se dit que "ça nous dépasse", là où les scénarios travaillés et structurés donnent une impression de facilité absolue...ouvrant ainsi aux critiques sur la qualité du scénario.
Et le film le plus représentatif de ça c'est bien évidemment :



Eh oui, présenter un univers aussi cohérent d'une manière aussi claire tout en introduisant tous les enjeux et personnages, le tout soupoudré d'humour et de scènes d'actions en 30 petites minutes ça mérite le respect.
Beaucoup ont une vision "romantique" du scénariste assis sur la plage à mettre ses trippes sur papier...alors que finalement écrire un scénario a beaucoup plus à voir avec les maths (pour les apprentis scénaristes, voir ici ).
Et ça demande d'ailleurs un travail monstre (4 ans pour Lucas, 1 an complet pour la narration pure de La mort aux trousses)
Récemment un film comme V for Vendetta s'est fait descendre là où Syriana (autrement plus bordélique) se faisait encenser.

Donc voilà, je voulais lancer ce débat sur les scénarios : pourquoi des films aux scénarios bordéliques se voient taxés de "profonds", "recherchés" là où les scénarios travaillés sont "simplistes".

L'efficacité est-elle synonyme de médiocrité chez la plupart des critiques ? Le fait de voir une oeuvre parfaitement cohérente, structurée, rythmée et donc de ne pas s'ennuyer et de ne pas avoir le temps de réfléchir entraîne-t-il la défiance des gens à l'égard d'oeuvres si efficaces ?

(c'est mon premier topic sur ce forum blush.gif )

EDIT : j'ai changé le titre (parce-que "Du rapport entre la complexité du film et sa qualité" c'est quand même long et prétentieux)
acide mo
CITATION(Elego @ 01 7 2007 - 15:56) *
En fait, les scénarios bordéliques donnent l'impression d'être travaillés, parce-que justement on a du mal à y trouver une certaine logique ou une certaine cohérence, donc on se dit que "ça nous dépasse", là où les scénarios travaillés et structurés donnent une impression de facilité absolue...


Alors ça, c'est excellent comme idée car bossant dans un vidéoclub, je m'aperçois que c'est ce que pas mal de gens pensent. Un exemple : Revolver ; c'est limite un chef-d'oeuvre pour certains justement parce qu'ils ont eu cette impression de complexité et que le scénario les a en grande partie (voir complètement) largué (alors que c'est "juste" super mal écrit et opaque dans ce que ça veut raconter).
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Bret Gimson
Le scénar de SW c'est du boulot de titan, un de mes scripts préférés de ma période proto-cinéphile, jouant sur une sécularisation permanente de l'aventure spatiale; associé au design général du film, au montage bluffant et la zique de Williams, c'est imparable. Mais je trouve le script assez complexe et loin d'être chiche.

J'ai une nette préférence pour les scripts "simples" genre Sorcerer de Friedkin ou Assault de Carpenter, quand c'est réussi c'est vraiment ce qu'il y'a de meilleur, de plus adapté au format cinéma (une narration étalée sur 1h30 à 2h).

Eh oui la confusion entre qualité de scénario et overdose de "péripéties" est monnaie courante...
Shub Lasouris
Interessant comme sujet. Déjà il me semble indispensable de séparer l'histoire proprement dite et la manière dont elle est racontée. Ainsi on peut avoir avoir des films avec une histoire super simple mais racontée de telle manière qu'on y comprend rien (peut-être n'y a-t-il rien à comprendre d'ailleurs) et inversement. J'ai pas vraiment d'exemple sous la main par contre.
Ensuite le rapport scénario/qualité d'un film change forcemment d'un film à l'autre. Par exemple un film comme Lost Highway est connu pour l'imcompréhension totale que génère son histoire. Pourtant c'est un excellent film qui met en avant les sensations grâce au travail de l'image et du son, plutôt que l'histoire. Je pense également que le spectateur lambda a parfois l'impression d'être devant un film à 'lhistoire génial, dès que le dit film l'abreuve de twists et autres pirouettes scénaristiques en tout genre, jusqu'à ce que le film ne devienne hélas incompréhensible.
Après est-ce qu'une histoire simpliste est forcemment boudée par la critique? Je pense pas qu'il y ait vraiment de rapport, et ça serait triste si c'était le cas. Je veux dire si on découvre un film uniquement pour son scénario, autant qu'on nous le raconte. Quoique ça dépend aussi du spectateur qui attache plus ou moins d'importance au scénario des films.
Bret Gimson
Le cas de Lynch à part je crois; je trouve que ce qui fascine dans ses films c'est chaque scène pris en elle-même, qui te mène jamais exactement à l'endroit ou tu devrais être avant la prochaine, plus que la confusion artificielle de ses scripts. On finit par s'en foutre de ce que ça raconte.
toto joke
Personnellement j'ai jamais trouvé que la destructuration d'un scénario était la marque d'une réussite quelconque. surtout qu'en général, ça se borne souvent à jouer soit sur le flashback soit sur le flashforward et pas plus. ca me laisse souvent l'arrière goût amer d'un effet de manche. Mais c'est vrai qu'il y en certains que la complexité excite - un peu comme en philo - ca leur donne parfois l'impression d'être plus intelligents. Perso entre la clarté d'un Schopenhauer et la complexité d'un Kant, j'ai tendance à préférer le style du premier.
A la limite j'ai personnellement tendance à préférer un scénar "bêtement" linéaire que des scénars déconstruits par des auteurs qui ont pas assez confiance en leur histoire et leurs personnages.
Ca veut pas dire que tous les scénars destructurés sont des attrape onanistes intellos hein. Yen a des bien, quand la forme sert vraiment le fond. A mon avis l'un des plus réussis dans ce domaine reste Memento par exemple.
L'archiviste
On a eu récemment une série de films qui permettent de juger assez clairement de ce qui fait la force ou la faiblesse du scénario.
Même personnages, même univers, même réalisateur, même comédiens et même producteurs
Je pense à la saga Spider-man :

Spider-man 1 : La ligne claire voire limpide du très demandé David Koepp (Jurassic Park, Carlito's Way) qui donne toujours au spectateur les éléments dont il a besoin au bon moment, épurant à l'extrême mais laissant un espace où l'imagination du public peut se déployer.

Spider-man 2 : Ecriture à plusieurs mains. Alvin Sargent et son goût pour la comédie humaine (La Barbe à papa, Des gens comme les autres), l'écrivain et prix Pulitzer Michael Chabon qui y greffe sa thématique "de l'importance d'être constant", et enfin les duettistes de Smallville Miles Millar et Alfred Gough. La ligne narrative reste claire, mais les thématiques et niveaux d'interprétation se multiplient au risque d'une très légère confusion.

Spider-man 3 : Sam Raimi et Ivan Raimi prennent la plume avec un Alvin Sargent apparemment débordé. Beaucoup d'idées ingénieuses et de thématiques très visuelles (le Sandman dont les molécules ne tiennent debout que par la force de sa culpabilité, la difficulté de se pardonner etc.) mais une narration la plupart confuse, avec des coutures visibles dans tous les coins ("si tu cherches le pardon va dans une église" hop comme ça après le mec est dans l'église), des personnages présentés à la truelle par manque de temps ("Bonjour, vous devez être le père de la jeune fille qui va bientôt mourir là haut. Bon ben moi je suis journaliste et en même temps son fiancé") des conclusions proposées à certains enjeux alors que l'amorce n'a pas été suffisament appuyée. 'fin bref c'est un peu le bordel et ça s'en ressent hélas sur l'émotion globale.

Les trois films racontent des histoires palpitantes et relativement séduisantes.
Ils sont tous trois impeccablement mis en scène.
Mais je pense que la réponse du public aux scénarii des trois fut assez claire :
"Le scénario de Spider-man 1 ? Heeuu... j'ai pas fait gaffe je regardais le film."
"Le scénario de Spider-man 2 ? Moi j'ai grave kiffé ceci; mon pote il a préféré plutôt ça et ma nana celà."
"Le scénario de Spider-man 3 ? Je sais pas mais y'a des trucs qui craignent dans le film non ?"


Quant au sujet de fond du topic, à savoir pourquoi public et critique ont tendance à légèrement mépriser le clair et l'évident, et trouver de l'intelligence dans le confus et l'inachevé, c'est un débat qui peut facilement nous faire sortir de la cinématographie pour voguer dans les eaux antiques de la sagesse bouddhiste, hellénistique, taoïste, humaniste etc. (je vois que ça a commencé dans le post juste au-dessus).
Suffit juste de se souvenir que les équations mathématiques les plus brillantes de notre Histoire tiennent en quelques lettres et chiffres, mais que si tu veux donner l'illusion de l'intelligence mathématique au profane, tu noircis un tableau entier avec des symboles incompréhensibles.
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Mad Mat
Un truc qui me scie de plus en plus chaque été, c'est que la norme actuelle, pour les gros blockbusters, c'est 2H20 ! blink.gif
On aboutit à une "trilogie" comme Pirates des Caraïbes, qui, sur une durée totale de plus de sept heures, ne raconte quasiment rien ! Mais comme c'est bourré de circonvulations, de twists, de dialogues interminables, ça donne l'impression d'être super riche et profond ! Et quand je lis que les scénaristes de ces trois films ont cherché à casser et transcender les codes de la narration classiques, je me marre : pour casser des codes, encore faut-il les connaître. Ou alors n'importe quel plouc mal habillé peut se proclamer dandy !

A l'opposé, Robocop, Terminator ou Mad Max, en à peine 100 minutes, parvenaient à :
- présenter un univers d'anticipation riche
- introduire des personnages attachants
- introduire, développer et clore plusieurs arcs narratifs (en 1h40, Murphy parvient à se venger, retrouver sa mémoire et son humanité et déjouer un complot au sein de l'OCP, plutôt pas mal)
- nous balancer des scènes d'action spectaculaires pendant lesquelles l'intrigue continue à suivre son cours, là où dans de nombreux films actuels, les scènes d'action, c'est le truc qu'on met entre les dialogues pour justifier les 150 millions de budget.

Je pourrais également citer le premier Indiana Jones, dont le scénario est un modèle de fluidité.

Plus récemment, je trouve qu'en 1H40, le premier X-Men racontait pas mal de trucs.

Je digresse un peu, mais tout cela me rappelle le lycée : certains rendent des dissertations d'une feuille double et une feuille simple (soit six pages) et se tapent des 15 ou plus, là ou d'autres tartinent des pages et des pages et s'étonnent de n'avoir que la moyenne au grand maximum ...
OrsonZ
CITATION(Mad Mat @ 01 7 2007 - 20:34) *
Je digresse un peu, mais tout cela me rappelle le lycée : certains rendent des dissertations d'une feuille double et une feuille simple (soit six pages) et se tapent des 15 ou plus, là ou d'autres tartinent des pages et des pages et s'étonnent de n'avoir que la moyenne au grand maximum ...

Je suis d'accord (et hop...une phrase icon_mrgreen.gif )
Doc Personne
La destructuration du scénario peut mener à des catastrophes comme le Ghosts of mars de Carpenter qui a profité du temps qu'il avait en bonus pour changer la narration de son film au moment du montage allant ainsi à l'encontre de ce qui fait la force de tous ses films : le montage linéaire. Disons que pour Carpenter c'était un peu expérimental. M'étonnerait qu'il le refasse un jour.
Par contre, chez certains réalisateurs ça marche comme pour Usual suspects où finalement l'histoire est très simple mais le chemin pris pour nous la raconter est tortueux et semé de chausse-trappes.
Pour ce qui est des flashes-forward, je n'ai qu'un exemple qui me vient c'est The Limey (L'anglais) de Steven Soderbergh et je me rappelle avoir trouvé ça très fort car très inhabituel.
Elego
Récemment j'ai revu L'homme de la plaine et en analysant des scènes au hasard (pour le bac) je me suis rendu compte à quel point sous une apparente simplicité le film était dense et complexe, et surtout plus je creusais plus j'avais l'impression de n'avoir accès qu'à une infime partie de ce film.

Bon la mise en scène est très importante mais si Mann peut être si libre c'est parce-que le scénario avait déjà été soigné et resoigné dans tous les sens, que l'histoire est totalement claire, les personnages parfaitement identifiables et que tous les changements/retournements du films fonctionnent sans problèmes.

Et à côté de ça j'ai un ami qui me disait (en parlant de L'homme de la plaine donc) "c'est trop limité, je préfère 2046* où on est plus libre". dry.gif

*autre film au bac cette année

Cette même personne m'expliquait aussi pourquoi le scénario de La colline a des yeux (version Aja) était "facile" et "simple", alors qu'il est juste monstrueux d'efficacité (on entre dans le bain immédiatement, on s'attache aux personnages sans problèmes, pour progressivement mais totalement naturellement rentrer dans une phase de survival pure).

ça doit être frustrant de faire du cinéma des fois.



Sinon à propos d'à l'intérieur, je comprends pas qu'un tel scénario ait pu être validé. En fait, a-t-il eu besoin d'être validé ou bien les "auteurs", une fois leur projet accepté et le contrat signé, pouvait faire ce qu'ils voulaient ? Parce-que là c'est vraiment des défauts qui sautent aux yeux, des problèmes de structure, de rythme, de construction des personnages.
Est-ce que le script doctoring est une pratique courante en France ?
Elego
CITATION(L @ 01 7 2007 - 20:16) *
On a eu récemment une série de films qui permettent de juger assez clairement de ce qui fait la force ou la faiblesse du scénario.
Même personnages, même univers, même réalisateur, même comédiens et même producteurs
Je pense à la saga Spider-man :

Spider-man 1 : La ligne claire voire limpide du très demandé David Koepp (Jurassic Park, Carlito's Way) qui donne toujours au spectateur les éléments dont il a besoin au bon moment, épurant à l'extrême mais laissant un espace où l'imagination du public peut se déployer.

Spider-man 2 : Ecriture à plusieurs mains. Alvin Sargent et son goût pour la comédie humaine (La Barbe à papa, Des gens comme les autres), l'écrivain et prix Pulitzer Michael Chabon qui y greffe sa thématique "de l'importance d'être constant", et enfin les duettistes de Smallville Miles Millar et Alfred Gough. La ligne narrative reste claire, mais les thématiques et niveaux d'interprétation se multiplient au risque d'une très légère confusion.

Spider-man 3 : Sam Raimi et Ivan Raimi prennent la plume avec un Alvin Sargent apparemment débordé. Beaucoup d'idées ingénieuses et de thématiques très visuelles (le Sandman dont les molécules ne tiennent debout que par la force de sa culpabilité, la difficulté de se pardonner etc.) mais une narration la plupart confuse, avec des coutures visibles dans tous les coins ("si tu cherches le pardon va dans une église" hop comme ça après le mec est dans l'église), des personnages présentés à la truelle par manque de temps ("Bonjour, vous devez être le père de la jeune fille qui va bientôt mourir là haut. Bon ben moi je suis journaliste et en même temps son fiancé") des conclusions proposées à certains enjeux alors que l'amorce n'a pas été suffisament appuyée. 'fin bref c'est un peu le bordel et ça s'en ressent hélas sur l'émotion globale.

Les trois films racontent des histoires palpitantes et relativement séduisantes.
Ils sont tous trois impeccablement mis en scène.
Mais je pense que la réponse du public aux scénarii des trois fut assez claire :
"Le scénario de Spider-man 1 ? Heeuu... j'ai pas fait gaffe je regardais le film."
"Le scénario de Spider-man 2 ? Moi j'ai grave kiffé ceci; mon pote il a préféré plutôt ça et ma nana celà."
"Le scénario de Spider-man 3 ? Je sais pas mais y'a des trucs qui craignent dans le film non ?"


Quant au sujet de fond du topic, à savoir pourquoi public et critique ont tendance à légèrement mépriser le clair et l'évident, et trouver de l'intelligence dans le confus et l'inachevé, c'est un débat qui peut facilement nous faire sortir de la cinématographie pour voguer dans les eaux antiques de la sagesse bouddhiste, hellénistique, taoïste, humaniste etc. (je vois que ça a commencé dans le post juste au-dessus).
Suffit juste de se souvenir que les équations mathématiques les plus brillantes de notre Histoire tiennent en quelques lettres et chiffres, mais que si tu veux donner l'illusion de l'intelligence mathématique au profane, tu noircis un tableau entier avec des symboles incompréhensibles.
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C'est marrant que pour expliquer les scénarios de chacun de ces scénario tu adoptes une structure semblable au scénario décrit, quelle mise en abyme icon_mrgreen.gif

En tout cas ton analyse m'a mieux permise de comprendre pourquoi j'ai toujours préféré Spiderman 1 aux deux autres, que j'avais trouvé plus clair, plus aéré, plus agréable à regarder là où les deux autres m'avaient semblés constamment too much et avec une construction maladroite des personnages (AMHA hein ! je sens déjà les briques me tomber dessus icon_mrgreen.gif ).
En fait le premier faisait beaucoup plus comics, ça voulait essentiellement raconter son humble histoire et tout n'était pas guidé par la seule nécessité de placer tout un tas de scènes d'actions qui déchirent leur race.

Ce dernier facteur est peut-être aussi responsable du manque d'efficacité flagrant du cinéma des années 2000, à force de toujours vouloir en faire plus, d'avoir un budget plus gros que celui de son voisin, avec une surenchère continue (Pirates des Caraïbes anyone ?).
C'est d'ailleurs ce refus de la surenchère que j'avais trouvé ultra efficace dans Piège de cristal, parce-que il y avait pas à proprement parler d'affrontement long et de scène qui déchire tout, mais un flux constant d'informations à l'écran et une logique dictée par l'histoire et pas par "là il faut en mettre plein la vue au spectateur".

C'est aussi ça qui fait que j'avais plutôt bien apprécié Les quatre fantastiques, qui pour le coup racontait son histoire tranquillement et efficacement, comme un vrai produit de divertissement populaire (ce qu'est FF à 100%) se doit de faire.
darkseid
Mouais, enfin pour le coup, FF passe de chef d'oeuvre simple en BD à film simpliste avec des personnages ridicules et inintéressant...
Elego
CITATION(darkseid @ 01 7 2007 - 23:15) *
Mouais, enfin pour le coup, FF passe de chef d'oeuvre simple en BD à film simpliste avec des personnages ridicules et inintéressant...


Oui ça n'a rien de révolutionnaire mais quand il était passé sur canal j'avais presque pris du plaisir à le regarder (et surtout : je m'étais pas ennuyé ! LE détail qui me rend tout de suite plus gentil envers n'importe quel film).
Cela dit je l'ai regardé que d'un oeil et si je le revoyais y a de fortes chances pour que j'accroche pas, mais quand je l'avais vu j'avais vachement apprécié de pouvoir regarder un truc easy-watching qui allait pas changer ma vie mais qui me ferait passer le temps.

(pour ma défense, je précise que la dernière fois que j'ai ouvert le comic j'avais 5 ans icon_mrgreen.gif )
muf
CITATION(L @ 01 7 2007 - 20:16) *
des personnages présentés à la truelle par manque de temps ("Bonjour, vous devez être le père de la jeune fille qui va bientôt mourir là haut. Bon ben moi je suis journaliste et en même temps son fiancé")


Ah oui mais là non: ok, le script de Spider-Man 3 a du mal à gérer sa propre densité, mais cette présentation éclair, elle était parfaite. Pas besoin de plus pour présenter le Capitaine Stacy, franchement (Gwen et Eddie étant plus développés par ailleurs); l'accumulation de liens présentés en un seul plan (Gwen est la fille du Capitaine, Eddie sort avec elle) concourt de la part "microcosmique" que revêt tout univers fictionnel; et en plus c'est très bien géré d'un point de vue du timing comique ("...and I'm dating your daughter") tout en participant à la caractérisation du personnage d'Eddie (les sentiments viennent en dernier).

CITATION(Elego @ 01 7 2007 - 22:57) *
En fait le premier faisait beaucoup plus comics, ça voulait essentiellement raconter son humble histoire et tout n'était pas guidé par la seule nécessité de placer tout un tas de scènes d'actions qui déchirent leur race.


C'est surtout que le premier déroulait le scénar interchangeable de n'importe quel film d'action des 90's ^^
Et je suis pas sûr qu'il y ait plus de scènes d'action dans le 2 et le 3; ceci dit, comme dans les Spider-Man la progression de la narration passe beaucoup par la baston, ça ne serait aucunement un mal (on ne peut pas opposer systématiquement les "scènes d'action" au développement de l'histoire - même s'il est vrai que c'est un défaut répandu dans les blockbusters).

Et l'histoire du comic Spider-Man, elle n'est pas spécialement "humble".
darkseid
De manière générale, c'est quand même le critère subjectif absolu pour juger un film : on s'ennuie ou pas, personnellement, un film comme FF m'a profondement ennuyé.
Sinon, je rebondis sur ce que tu dis, certains films ayant l'apparence de la complexité peuvent être au contraire très simplistes et artificiellement allongés : il y'a un paquet de blockbusters récents qui entrent dans cette catégorie comme Pirates 2 ou encore Matrix Reloaded.
Travis
Avant toute chose, peut-être faudrait-il distinguer scénario et histoire. Le scénario contient le déroulement des actions, les dialogues, des indications techniques, c'est le canevas de la mise en scène, c'est à la fois l'intrigue et la façon de raconter cette intrigue, alors que l'histoire n'explique pas comment c'est filmé, cadré, découpé, ce n'est rien d'autre que ce qui est raconté. L'histoire peut multiplier les rebondissements, accumuler les péripéties et se terminer sur un twist improbable, on dira que c'est une histoire rocamblesque, farfelue, complètement fantaisiste et incohérente. Mais osera-t-on dire que le scénario est mauvais, si une telle histoire a été conçue et voulue de la sorte et si la mise en scène est réfléchie ? Une histoire bordélique rend-elle le scénario inepte et le film débile ? Il faut peut-être ici penser au genre du film et accepter qu'un film d'aventures repose sur une intrigue biscornue et saugrenue ou qu'un film d'action enchaîne des faits déments. Je pense qu'on aime ou non une histoire, c'est une affaire de goût et de sensibilité, et qu'on doit juger de la qualité d'un scénario d'un œil critique. Je n'apprécie pas un film parce que c'est une histoire d'amour ou bien une histoire avec des chevaliers et des dragons. Comment juger de la qualité d'une histoire, quand la qualité ne dépend pas de ce qui est raconté mais de la manière dont c'est raconté ? Certains spectateurs vont préférer la simplicité à la complexité, mais là aussi : à quoi cela renvoie-t-il ? Ce qui est simple est-il linéaire ? L'idéal classique (action simple, avec un début, une progression et un dénouement, sans intrigue secondaire, unité de temps et de lieu, sobriété et austérité apparentes de l'ensemble), est-ce que c'est ça la simplicité ? Au point que cette rigueur et cette sécheresse rendent la chose simplissime ? Ce serait un carcan et il faudrait bousculer les règles, destructurer le tout, inventer autre chose. Cette inventivité apparaît comme de la complexité. En effet les schémas de création et de réception sont modifiés, il s'ensuit que cette complexité peut sembler étrange et incompréhensible. C'est là un nouveau point : alors que ce qui est simple paraît facile d'accès, ce qui est complexe risque d'être déroutant et rebutant. D'où le fait que les œuvres vraiment innovantes sont souvent rejetées, malcomprises ou voire même incomprises. Cela signifie-t-il que ce qui est complexe est compliqué, obscur, incompréhensible ? En se forçant, sans doute que cela devient clair. Ce n'est pas parce qu'on ne comprend pas que c'est incompréhensible. Attention, je ne voudrais pas légitimer par là les scripts complètement crétins ! Je voulais juste dire que la question posée fait intervenir pas mal de notions et pourrait nous mener assez loin.

Pas forcément la comparaison la plus pertinente, Toto Joke : Schopenhauer et Kant s'expriment tous les deux dans un style limpide, mais leurs concepts exigent une certaine attention pour être compris. Ils sont tous les deux compréhensibles ! Schopenhauer recommande même plus que fortement la lecture de Kant avant d'entreprendre celle de son œuvre. Dans le style guère intelligible, Hegel plutôt se pose là.
Prosopopus
CITATION(Travis @ 02 7 2007 - 00:03) *
Avant toute chose, peut-être faudrait-il distinguer scénario et histoire. Le scénario contient le déroulement des actions, les dialogues, des indications techniques, c'est le canevas de la mise en scène, c'est à la fois l'intrigue et la façon de raconter cette intrigue, alors que l'histoire n'explique pas comment c'est filmé, cadré, découpé, ce n'est rien d'autre que ce qui est raconté.


Je ne suis pas forcément spécialiste, mais il me semblait justement que le scénario collait à l'histoire que le film allait raconter. Un scénariste n'a finalement que peu d'impact sur le découpage, cadrage, montage qui vont plutôt découler d'un découpage technique du film, et qui est finalement la grande partie du travail d'un réalisateur. Sans cela, il ne serait qu'un metteur en scène de théatre. Un scénario découpe des séquences à la façon des scènes de théatre selon la location et les personnages mais n'explique pas comment c'est filmé. Cet avis est ouvert à discussion et il s'agit peut-être d'une vision trop classique du scénario. Cependant si le scénario est réellement la base de la réalisation pourquoi des bons scénars donnent des mauvais films ?
Elego
CITATION(darkseid @ 01 7 2007 - 23:30) *
certains films ayant l'apparence de la complexité peuvent être au contraire très simplistes et artificiellement allongés : il y'a un paquet de blockbusters récents qui entrent dans cette catégorie comme Pirates 2 ou encore Matrix Reloaded.


Ok pour Pirates 2, c'est bourré de séquences inutiles, ça raconte toujours la même chose, aucune montée dramatique, aucune place pour le spectateur là-dedans, bref un gros truc bordélique.

Matrix Reloaded je suis pas fan, mais quand je vois des gens qui sont capables de pondre des tartines sur la logique de l'univers matrixien et qu'en plus la plupart du temps ils ont raisons, je me dis que humblement que j'ai pas tout saisi et vu que j'ai pas aimé ça me donne pas envie de pousser plus loin.
Après c'est sûr que la construction du film pousse pas à la compréhension, les dialogues manquent de clarté sweat.gif


Sinon pour Prosopopus :

Le scénario c'est pas l'histoire en elle-même mais c'est la manière dont elle est racontée (la narration quoi).

George Lucas avait déjà son univers, ses personnages et son histoire avant d'avoir écrit une ligne de scénario.

D'ailleurs sur plein de film l'histoire et le scénario sont différenciés (pour Darkman y a Sam Raimi qui s'occuppe de l'histoire, puis qui s'attaque au scénario avec quatre autres scénaristes)
Dr Rabbitfoot
J'aime bien l'idée derrière la création de ce topic (merci Elego !) car elle me turlupine depuis un moment.
En fait je me faisais une drole de réflexion il y a peu : les films que j'apprécie de voir souvent ne sont pas les films que je considère comme "les meilleurs" que j'ai vus. Et je me demandes pourquoi ...
En clair : il y a certains films que j'admire plus que tout et que je revoie bizarrement assez peu (ex: "Citizen Kane", "Le Parrain", "La Porte du Paradis" ...).

A l'opposé il y a des films que je considère comme bons, mais sans être des chef d'oeuvres, et que pourtant je dois revoir au moins une fois par an. Et toujours avec un vrai enthousiasme !
Ex : "Jennifer 8" de Bruce Robinson, "Un Ticket pour Deux" de John Hughes, "Smoke" de Wayne Wang, ou "Hypnose" de David Koepp (mais je pourrais en citer au moins 50 ! Là ce sont les premiers qui me viennent à l'esprit).
Et le plus incroyable, c'est que quand je revois ce type de films, je suis comme pris d'amnésie partielle : je les revoie comme si je ne les avais pas revus depuis 20 ans, je connais l'histoire mais bizarrement j'en ai oublié de nombreux détails ...


Je m'arrête sur le cas de "Hypnose" car il est assez révélateur pour moi. Déjà il est tiré d'une oeuvre de Richard Matheson, donc c'est une adaptation. Mais une très bonne adaptation, qui garde ce qui fait la personnalité et le sel de l'histoire originale, tout en la modernisant et en la trahissant juste ce qu'il faut. Bref : la même histoire mais différente smile.gif
Mais là où Koepp fait très fort, c'est qu'en gros le scénario parait simpliste puisqu'il peut être résumé en 2 phrases : "Le héros, trentenaire en difficulté dans son couple, participe à une séance d'hypnose qui va changer sa perception des choses. Désormais victime de l'apparition du fantome d'une adolescente, il va tout faire jusqu'à l'obsession pour comprendre qui elle est, mettant en danger sa santé mentale et son couple".
Voilà, en gros là j'ai résumé le film, et si on occulte le déroulement final, Koepp ne sort pas de cette ligne là.
Et pourtant, Koepp signe un film de 1h35 tendu comme un string d'ado sur cette simple trame ! Un film sans temps mort, avec des personnages psychologiquement TRES fouillés et complexes, avec de nombreuses thématiques abordées (la paternité, les difficultés de la vie de couple, l'appartenance à un groupe social, le viol, les secrets familiaux, l'obsession jusqu'au boutiste, ...etc). Et tout ça sans donner l'air d'y toucher !
Pour beaucoup de gens ce n'est qu'une aimable série B agréable à regarder, mais pas plus. Et Koepp nous vend le film tel quel. Trop modeste ! Le film est sacrement efficace et distille une tonne de détails scénaristiques très riches, sans prendre le spectateur pour un con, et sans péter plus haut que son cul. Pour moi c'est un modèle de scénario efficace.
Travis
On est bien d'accord : le scénariste ne remplace pas le réalisateur, très souvent ce n'est pas lui qui filme, il ne dirige pas les acteurs, ne s'occupe pas du montage, etc. Le scénario n'est qu'un matériau. Néanmoins il ne se contente pas de coller à l'histoire, il indique aussi la démarche filmique. Prenons l'exemple avancé plus haut, Memento de Nolan. Quelle est l'histoire ? Un type recherche l'assassin de sa femme, mais il est atteint d'amnésie, il ne souvient pas de ce qu'il a pu faire le quart d'heure précédent. Pour mener son enquête personnelle, il remplit compulsivement des fiches, collecte des photos, se fait tatouer des indices. En quoi consiste le scénario ? Principalement en un renversement de la chronologie de l'histoire, qui n'est cependant pas une manœuvre non motivée, un simple artifice, puisqu'elle est porteuse de sens. Ce procédé de narration inversée est appliqué à l'histoire pour en faire un objet filmique. Le scénario joue de ce fait un rôle dans le découpage, c'est même le travail du scénariste d'établir l'ordre séquentiel. Allons plus loin : l'idée d'un simple plan peut être présente dans le scénario, sans évoquer l'aspect technique mais en le sollicitant. Exemple, on lit dans le scénario : Sur le mur, scotchées en désordre au-dessus des urinoirs, se trouvent des photographies d'actrices de cinéma découpées dans des journaux et des revues : Louise Brooks, Ingrid Bergman, etc. Est-ce un détail quelconque du décor ? Est-ce un élément important dans l'intrigue ? Comment filmer ces affiches ? En gros plan fixe ? En zoomant ? Vont-elles apparaître très discrètement en arrière-plan ? Au réalisateur de faire un choix. La phrase se trouve au début du scénario de Lulu on the bridge de Paul Auster. Voici la suite : La caméra détaille les visages de ces stars. Changement d'angle : gros plan du visage d'Izzy qui examine les photos tout en pissant. On comprendra au cours du film que ces quelques plans initiaux donnent une piste essentielle pour interpréter l'histoire.

Ce qui serait intéressant, ce serait de voir la qualité du scénario et son utilisation par le réalisateur. Le scénario peut contenir de nombreux détails, s'efforcer de créer tout un univers fictif et donner moult indications pour la mise en scène, ou alors il peut être excessivement pauvre, ne remplir que deux pages, et dans ces conditions la création du film repose davantage sur le travail des autres. Imaginons le réal qui tourne ses scènes au jour au jour sans plan préconçu, des acteurs qui écrivent le texte ou qui improvisent. Cela ne veut pas dire qu'un scénario très riche fera un bon film, ni que le manque de préparation et de maîtrise est un handicap, car justement peut-être permet-il de laisser libre cours à plus de fantaisie et d'inventivité.
powerranger
CITATION(Elego @ 02 7 2007 - 08:22) *
CITATION(darkseid @ 01 7 2007 - 23:30) *
certains films ayant l'apparence de la complexité peuvent être au contraire très simplistes et artificiellement allongés : il y'a un paquet de blockbusters récents qui entrent dans cette catégorie comme Pirates 2 ou encore Matrix Reloaded.


Matrix Reloaded je suis pas fan, mais quand je vois des gens qui sont capables de pondre des tartines sur la logique de l'univers matrixien et qu'en plus la plupart du temps ils ont raisons, je me dis que humblement que j'ai pas tout saisi et vu que j'ai pas aimé ça me donne pas envie de pousser plus loin.


Bof, il est possible de disserter tout et n'importe quoi sur tout et n'importe quelle oeuvre, qu'elle que soit ça nature. C'est en gros ce qu'apprend l'université (ceux qui ont suivit une filière arts-plastiques pourront sans doute témoigner en ma faveur). Ca à d'ailleur un nom dans l'art (notamment contemporain): La théorie du pic-nic (François Morellet, Comment taire mes commentaires). Après, le côté "patchwork" de la chose agite nécessairement l'imaginaire réflexif. Mais en aucun cas, ne rend l'ensemble formel (visuel et écrit) plus honorable.

A titre d'exemple, je me souviens être tombé un jour sur un texte brillant concernant Le Cobaye. La lecture en faisait un chef-d'oeuvre thématico-théorique. Mais formellement, au revisionnage, ça restait malgré tout toujours aussi foireux.


Pour revenir au sujet principal, j'ai aussi tendance à préférer les scénario linéaire, car ce sont bien souvent les plus carré, faisant confiance aux personnages et à leur répliques pour tourner à plein régime. Un exemple vu récemment qui me vient en tête concerne L'Armée des Ténèbres (eh oui, je l'avais jamais vu jusqu'à hier soir). Narration rapide, mise en place immédiate, structure simple dopé aux punchlines et aux persos charismatiques.
toto joke
CITATION(Travis @ 02 7 2007 - 00:03) *
Pas forcément la comparaison la plus pertinente, Toto Joke : Schopenhauer et Kant s'expriment tous les deux dans un style limpide, mais leurs concepts exigent une certaine attention pour être compris. Ils sont tous les deux compréhensibles !


Eh ben Kant pas par moi ! icon_mrgreen.gif

Sinon je me demande si "Trois enterrements", un film que j'aime beaucoup, serait aussi fort monté de façon classique. J'ai l'impression que jouer avec le temps du scénar a plus à voir avec une connivence ludique et donc cérébrale qui se crée entre le film et le spectateur qu'avec un aspect émotionnel.
Jamic
CITATION
Je digresse un peu, mais tout cela me rappelle le lycée : certains rendent des dissertations d'une feuille double et une feuille simple (soit six pages) et se tapent des 15 ou plus, là ou d'autres tartinent des pages et des pages et s'étonnent de n'avoir que la moyenne au grand maximum ...
Moi je trouve que c'est une bonne comparaison. Mais dans mon cas, quand je rendais deux pages j'avais "13/20 mais il faudrait développer vos idées" et quand je rendais 5 pages j'avais "5/20 parce que hors-sujet".
Donc, pour continuer dans cette comparaison, t'avais un prof "grand public" et moi un prof "cinéphile madeux".



CITATION
JMais là où Koepp fait très fort, c'est qu'en gros le scénario parait simpliste puisqu'il peut être résumé en 2 phrases : "Le héros, trentenaire en difficulté dans son couple, participe à une séance d'hypnose qui va changer sa perception des choses. Désormais victime de l'apparition du fantome d'une adolescente, il va tout faire jusqu'à l'obsession pour comprendre qui elle est, mettant en danger sa santé mentale et son couple".
Voilà, en gros là j'ai résumé le film, et si on occulte le déroulement final, Koepp ne sort pas de cette ligne là.
J'ai l'impression que tu confonds scénario et pitch, là.


Pour en revenir au sujet initial, j'ai l'impression que le fait de dire "intrigue compliquée = bon film" tient plus du conformisme que d'un véritable avis personnel.
"Mais oui, M'dame Michu, hier soir à la tévé y'a Daniel Toscan Séplanté qu'a dit que <nom d'un film d'art et d'essai que seuls les lecteurs de Télérama connaissent> c'est très bien pasque y'a plein de gens qui s'aiment et qui s'aiment pus pis qui s'reaiment. Bon, j'ai pas tout bien compris mais si à la tévé ils disent que c'est bien, c'est que ça doit être bien, non ?"
Elego
CITATION(Travis @ 02 7 2007 - 12:51) *
On est bien d'accord : le scénariste ne remplace pas le réalisateur, très souvent ce n'est pas lui qui filme, il ne dirige pas les acteurs, ne s'occupe pas du montage, etc. Le scénario n'est qu'un matériau. Néanmoins il ne se contente pas de coller à l'histoire, il indique aussi la démarche filmique. Prenons l'exemple avancé plus haut, Memento de Nolan. Quelle est l'histoire ? Un type recherche l'assassin de sa femme, mais il est atteint d'amnésie, il ne souvient pas de ce qu'il a pu faire le quart d'heure précédent. Pour mener son enquête personnelle, il remplit compulsivement des fiches, collecte des photos, se fait tatouer des indices. En quoi consiste le scénario ? Principalement en un renversement de la chronologie de l'histoire, qui n'est cependant pas une manœuvre non motivée, un simple artifice, puisqu'elle est porteuse de sens. Ce procédé de narration inversée est appliqué à l'histoire pour en faire un objet filmique. Le scénario joue de ce fait un rôle dans le découpage, c'est même le travail du scénariste d'établir l'ordre séquentiel. Allons plus loin : l'idée d'un simple plan peut être présente dans le scénario, sans évoquer l'aspect technique mais en le sollicitant.


Je vois ce que tu veux dire, ton utilisation du mot "découpage" portait à confusion (je croyais que pour toi un scénario c'était gros plan sur Julie : elle a les yeux rouges, contre-champs : Robert remarque qu'elle pleure et détourne les yeux).

Donc oui l'ordre des séquences doit être défini par le scénariste, puisqu'il doit gérer la manière dont les informations sont données au spectateur.

En fait pour simplifier à l'extrême :

Le réalisateur et le scénariste (et le producteur, l'acteur, et le chien) développent une histoire, un univers, des personnages, des situations, des dialogues.

Puis :
- Le scénariste fait son boulot de scénariste, c'est-à-dire il organise toutes les informations, quand tel personnage apparaît, quand on apprend telle chose, etc.
bref : il choisit des éléments qui existent pour les réorganiser

Ensuite le réalisateur vient faire exactement la même chose, mais avec le scénario (il choisit ce qu'il va montrer mais surtout il choisit comment il va les montrer).

(en fait, le cinéma c'est une question de choix ! comme l'art en fait...comme la vie !)



Sinon je viens de regarder Open Range et le film fait preuve d'un classicisme agréable qui rappelle Mann, Ford ou Hawks, même s'il aurait gagné à condenser son intrigue.
Prosopopus
Oui on est d'accord en fait, l'histoire, sorte de synopsis du film sur ce qu'il raconte dans les grandes lignes, sera racontée par le scénario qui choisit un mode narratif.

@ Elego Je sais bien que l'histoire n'est pas le scénario (merci) je voulais juste dire que le scénario reste sur un plan plus narratif que technique. Je suis d'accord avec toi sur la suite de relectures d'un postulat de base qui donne un film.

Par ailleurs la narration peut prendre beaucoup plus d'importance par le travail du réalisateur. Sur ce point Siodmak avait un procédé amusant. On lui donnait un scénario à tourner, il le lisait, puis demandait généralement un changement aux producteurs, un changement en apparence anodin. Il commençait à tourner, puis avant certaines séquences expliquaient aux producteur qu'il fallait légèrement changer le scénario pour être en accord avec la première modification. Ainsi de suite...

Pour Memento j'ai tendance à penser que le procédé de découpage fait partie de l'histoire (ou plutôt du postulat de base), que le film a été d'abord pensé comme ça et que le scénario a dû respecter et faire marcher cette charte. Mais je voudrais bien des éclaircissements.

EBE
CITATION(Elego @ 02 7 2007 - 14:27) *
CITATION(Travis @ 02 7 2007 - 12:51) *
On est bien d'accord : le scénariste ne remplace pas le réalisateur, très souvent ce n'est pas lui qui filme, il ne dirige pas les acteurs, ne s'occupe pas du montage, etc. Le scénario n'est qu'un matériau. Néanmoins il ne se contente pas de coller à l'histoire, il indique aussi la démarche filmique. Prenons l'exemple avancé plus haut, Memento de Nolan. Quelle est l'histoire ? Un type recherche l'assassin de sa femme, mais il est atteint d'amnésie, il ne souvient pas de ce qu'il a pu faire le quart d'heure précédent. Pour mener son enquête personnelle, il remplit compulsivement des fiches, collecte des photos, se fait tatouer des indices. En quoi consiste le scénario ? Principalement en un renversement de la chronologie de l'histoire, qui n'est cependant pas une manœuvre non motivée, un simple artifice, puisqu'elle est porteuse de sens. Ce procédé de narration inversée est appliqué à l'histoire pour en faire un objet filmique. Le scénario joue de ce fait un rôle dans le découpage, c'est même le travail du scénariste d'établir l'ordre séquentiel. Allons plus loin : l'idée d'un simple plan peut être présente dans le scénario, sans évoquer l'aspect technique mais en le sollicitant.


Je vois ce que tu veux dire, ton utilisation du mot "découpage" portait à confusion (je croyais que pour toi un scénario c'était gros plan sur Julie : elle a les yeux rouges, contre-champs : Robert remarque qu'elle pleure et détourne les yeux).



Yup, juste une petite participation à ce topic bien trouvé. Effectivement, les indications de plans écrites telles quelles (genre Gros plan, Travelling, etc) sont fortement à proscrire, mais je lis depuis plusieurs posts que certains considèrent en somme le scénario comme juste une histoire, sans suggestion de mise en scène d'aucune sorte. Sur ce point là, je suis moins d'accord, beaucoup de scénaristes utilisant par exemple une technique toute simple indiquant à mots couverts au réalisateur qu'il serait souhaitable de faire une coupe et d'avoir tel type de plan. C'est un truc tout simple, utilisé par beaucoup, je vais tenter de l'expliquer le plus simplement possible : au lieu d'écrire quelque chose du genre "Plan large de Michel près d'un lac. Il regarde le sol. Gros plan d'un journal posé sur le sol." en utilisant des indications de plan qui pourraient inciter le réalisateur, par esprit d'indépendance, à ne pas suivre lesdites indications, le scénariste va faire passer la même idée de la façon suivante : "Michel se trouve près d'un lac (à priori, si le réalisateur veut montrer ledit Michel près d'un lac, il utilisera très certainement un plan large). Il regarde le sol. Retour à la ligne, puis le scénariste indique : Sur le sol, un journal. (ce qui sous entend, par le biais du retour à la ligne, un changement de plan, et étant donné que la seule chose décrite ici est un journal, ceci sous entend à priori l'usage d'un gros plan).

Tout ça pour dire qu'un scénario, en fonction de qui l'écrit (et la technique que je viens de vous décrire vite fait mal fait est utilisée par beaucoup, de Carrière à de nombreux scénaristes américains) comportera nécessairement des idées de mise en scène plus ou moins dissimulées, suggérant plus qu'imposant un découpage précis, découpage dont de toute façon, bien sûr, le réalisateur fera ce qu'il voudra (par exemple faire un mouvement de grue partant d'un plan large pour finir en gros plan sur le journal, sabrant au passage l'idée d'un changement de plan induite par le scénariste lors de son retour à la ligne), mais découpage qu'il sera plus apte à suivre, n'ayant pas le sentiment que le scénariste essaie de faire son boulot à sa place.

Voilà voilà, c'est tout ce que j'ai à déclarer pour l'instant, monsieur ! smile.gif
Methos

Pour revenir aux scénarios dit "simplistes", on peut citer IL ÉTAIT UNE FOIS DANS L'OUEST et LA BRUTE ET LE TRUAND. Si vous demandez aux gens ce qu'ils pensent du scénario, où même de résumer de quoi ça parle, ils vont donneront une réponse laconique. La réalisation de de Sergio Leone prend tellement de place, qu'on en oublie que ces deux films ont chaucun un scénario très solide, logique et parfaitement stucturé.
L'archiviste
Le Bon, la Brute et le Truand, j'ai compris de quoi ça parlait à la 70ème vision environ
(je déconne pas)
icon_mrgreen.gif

Tu m'aurais posé la question à la 60ème vision, je t'aurais dit que le scénar était impeccablement structuré et le film un authentique chef-d'oeuvre.
Là, aujourd'hui, j'ai juste plus de mots...
Elego
Je suis re-re-re-regardé Star wars IV hier et y a un très court passage que j'ai trouvé assez représentatif de l'efficacité narrative du film :

les wampas (ou peu importe leurs noms) sont arrivés avec les droïdes à la ferme Skywalker.
Luke et son oncle s'avancent vers eux, mais Luke est appellé par sa tante, qui répète son nom 3/4 fois (hop : on sait que luke est le héros et qu'il s'appelle Luke)
Sa tante commence par lui dire "dis à ton oncle" (hop on sait que c'est son oncle et elle sa tante...problème dans la famille), la suite concerne un achat d'équipement (hop, on se doute que c'est pas un camp de vacance, genre mini-usine...ou ferme tiens).

Bref, en 20 secondes maxi, Lucas a présenté le personnage principal, le public a retenu son nom, on sait qu'il a un problème dans sa famille, la femme ici présente et l'homme avec qui il marchait quelques secondes avant sont sa tante et son oncle, qu'il les aide dans leur travail, et même qu'il se montre serviable (il réagit immédiatement quand sa tante l'appelle).

De l'efficacité brute quoi.
Rob Van Ana
CITATION(Elego @ 03 7 2007 - 09:33) *
De l'efficacité brute quoi.


ou une simple représentation de la vie icon_mrgreen.gif


Nan sérieux, faut arrêter d'intellectualiser des choses qui à la base ne sont pas et sont beaucoup plus simples que ce qu'on veux bien leur attribuer.

Enfin je dis ça, je parle un peu d'expérience personnelle là (j'expliquerai plus tard). C'est possible que le mec est un übergenius ( quoique, vu les problèmes de continuité qu'on peut voir entre les trilogies, je me pose sérieusement la question ) qui planifie tout comme un porc. Mais c'est possible aussi que le gars a fait face à cette situation, qu'il n'a aucune conscience de l'efficacité de son écriture parce qu'à la base, il a pris un bout de vie réelle.

Enfin, si j'avais voulu parler d'efficacité pour un film, j'aurai choisi un passage plus emblématique de la chose, pas une scène que 500 ou 600 millions de personnes ont du vivre dans leur vie icon_mrgreen.gif



Bon, je vais faire mûrir ma réflexion sur le topic parce que j'ai vraiment envie de participer et que j'aime pas juste remettre en doute un poste qui me paraît un peu abusé (ça sonne comme de la branlette intellectuelle quand je le lis, mais ne le prend pas pour toi hein. Je remet en jeu le post, pas celui qui l'a écrit. Ça m'arrive aussi d'en faire de la branlette intellectuelle blush.gif ) sans réellement construire quelque chose de structuré qui fait avancer le débat plutôt que de le stopper. Donc veux bien m'excuser pour cette entrée tracassante ( pour moi là, parce que j'ai l'impression d'être le gros salaud du western ninja.gif ) et laisses moi le temps de ramifier les tenants et aboutissants de ma pensée si tu le permets smile.gif
Bret Gimson
Je suis d'accord, l'angle analytique est branlantoire et il vaut mieux se poser la question de la représentation que de chercher à comprendre des mécanismes qui n'ont aucun rapport avec la fabrication d'une histoire - mais bon là c'est tout le rapport entre le système éducatif occidental et l'art qui est à refaire (je pense qu'on part en couille à partir du moment où se met à invoquer Baudrillard pour parler de Carpenter mais c'est une tendance très courante depuis quelques années et largement véhiculée par la presse spécialisée, des Cahiers à Mad, mais aussi les facs, les écoles...).
Elego
CITATION(Rob Van Ana @ 03 7 2007 - 10:56) *
CITATION(Elego @ 03 7 2007 - 09:33) *
De l'efficacité brute quoi.


ou une simple représentation de la vie icon_mrgreen.gif


Nan sérieux, faut arrêter d'intellectualiser des choses qui à la base ne sont pas et sont beaucoup plus simples que ce qu'on veux bien leur attribuer.

Enfin je dis ça, je parle un peu d'expérience personnelle là (j'expliquerai plus tard). C'est possible que le mec est un übergenius ( quoique, vu les problèmes de continuité qu'on peut voir entre les trilogies, je me pose sérieusement la question ) qui planifie tout comme un porc. Mais c'est possible aussi que le gars a fait face à cette situation, qu'il n'a aucune conscience de l'efficacité de son écriture parce qu'à la base, il a pris un bout de vie réelle.

Enfin, si j'avais voulu parler d'efficacité pour un film, j'aurai choisi un passage plus emblématique de la chose, pas une scène que 500 ou 600 millions de personnes ont du vivre dans leur vie icon_mrgreen.gif



Bon, je vais faire mûrir ma réflexion sur le topic parce que j'ai vraiment envie de participer et que j'aime pas juste remettre en doute un poste qui me paraît un peu abusé (ça sonne comme de la branlette intellectuelle quand je le lis, mais ne le prend pas pour toi hein. Je remet en jeu le post, pas celui qui l'a écrit. Ça m'arrive aussi d'en faire de la branlette intellectuelle blush.gif ) sans réellement construire quelque chose de structuré qui fait avancer le débat plutôt que de le stopper. Donc veux bien m'excuser pour cette entrée tracassante ( pour moi là, parce que j'ai l'impression d'être le gros salaud du western ninja.gif ) et laisses moi le temps de ramifier les tenants et aboutissants de ma pensée si tu le permets smile.gif


Demande-toi alors pourquoi la plupart des scénaristes ont tant de problèmes pour atteindre l'efficacité narrative de Star Wars.
Si ça n'était qu'une "simple représentation de la vie", ne crois-tu pas que nombre de films français se voulant réaliste dans la représentation de la vie seraient plus efficace ?

Et quand on sait que Lucas a mis 4 ans à peaufiner la narration d'Un nouvel espoir, ça enlève l'excuse de "c'est juste une représentation de la vie". Un bon scénariste ne balance pas des scènes gratuitement, il les fait pour faire avancer son histoire et pas par simple plaisir de balancer "une scène que 500 ou 600 millions de personnes ont du vivre dans leur vie".

Si tu veux t'en convaincre regarde les téléfilm, où la plupart du temps le héros est balancé dans l'histoire sans autre forme de procés et sans que le spectateur ne l'ait identifié (d'où le ridicule quand on se rend compte de qui est le héros...).
Beaucoup de gens passent à côté de l'efficacité parce-qu'ils veulent à tout prix reproduire une scène "épique", sauf que ce que ces gens-là n'ont pas compris c'est que la force de ces scènes passe par une efficacité narrative et une présentation fouillée des personnages et des enjeux...
Donc ce travail c'est un peu la partie immergée de l'iceberg, on la voit pas mais c'est elle qui fait flotter le petit bout.

Et pour finir, un exemple représentatif : sur La mort aux trousses, le travail scénaristique pur (c'est-à-dire uniquement la narration, l'histoire et les personnages étaient déjà créés) a prit rien de moins qu'un an...
Clint
Comme mentionné auparavant, il ne faut pas confondre histoire et scénario. La qualité première d'un script c'est sa clarté. Surtout si ce dernier raconte une histoire complexe. Exposer simplement des choses compliquées, c'est un art. Tout comme maîtriser la linéarité (le simplisme ?) en y incluant des éléments d'exposition francs et directs.
Tout ça est cependant bien flou puisque des films écrits avec les pieds peuvent donner de très bons films et vice-versa. La magie du travail d'équipe peut faire des miracles ou des horreurs.
Rob Van Ana
Bah je vais baser ma réflexion sur du général, et pas prendre comme exemple un film en particulier ( surtout pas l'univers Star Wars qui assume trop de contradictions pour qu'il en soit représentatif à mon humble avis. D'ailleurs à ce propos, une représentation de la vie peut devenir élément de narration après relecture, c'est aussi dans ce sens là que je voulais le dire. Loin de moi l'idée de dire que Lucas a fait de la merde, je tenais juste à exprimer de façon pas claire apparement qu'on a tendance à la suranalyse par moment. On analyse tellement tout que tout fait sens... maintenant, allez analyser un scénario écrit par plusieurs personnes... )

Bon, donc le scénario, j'apprend sur le tas. C'est une réelle passion et aussi un vecteur d'échange avec d'autres personnes qui partagent cette passion. Du coup je me base sur une expérience de scénariste très amateur, avec toutes ses lacunes et ses qualités ( s'il y en a ) pour poser mon avis à ce sujet. Loin de moi l'idée d'exprimer une vérité générale. Disons que quelque part je sélectionne plus des moments du débat intéressants par leur redondance. blush.gif

D'une part, les analystes que j'ai croisé ont toujours eu extrêmement de mal à poser un scénario sur le papier, trouvant leur travail trop pourri tant bien même qu'il fut plus que correct. D'autre part, les instinctifs ont toujours réussi à clairement et simplement accoucher d'une version suffisament malléable pour qu'elle puisse être travaillée. Là j'me dis que le milieu c'est la situation idéale. icon_mrgreen.gif

De deux, la majorité ( mais alors très grande pour le coup, ça m'a même étonné ) se rend compte de la portée symbolique, sémantique, syntaxique de leurs scènes après relecture du scénario dans son ensemble. C'est la scène qui donne la signification, pas la signification qui donne la scène en quelque sorte. Là j'me dis que le processus est à peu près le même pour tout le monde, à savoir imaginer la scène dans sa tête puis la poser, le processus sémantique étant un moment transparent de l'écriture du scénario. ninja.gif

De trois, j'ai expréssément fait le choix de voir ce que ça donne aux Etats Unis pour les cours de la matière. A ma grande surprise, il y a très très très peu de références à une quelconque analytique du scénario. Le cinéma ricain ayant ses spécificités mercantiles ( plusieurs scénaristes à la fois, des spécialistes des dialogues etc ), il peut déjà paraître comme un travail d'équipe, l'un venant combler les lacunes de l'autre. Mais la base, le conseil ultime reste : écrit à l'instinct ! D'où peut être cette allusion irraisonée à la branlette intellectuelle, qui est largement entretenue dans les écoles de cinéma par quelques profs élitistes qui se sentent obligés de péter plus haut que leur cul ( et on voit où ça mène le cinéma français. J'suis désolé mais ayant plusieurs amis passés par là, je vais pas répéter mot à mot ce qu'ils en disent mais globalement c'est : " t'as intérêt à avoir vachement la tête sur les épaules si tu veux pas devenir un gros connard arrogant qui fera jamais rien d'intéressant dans sa carrière " icon_mrgreen.gif Loin de moi l'idée de généraliser encore une fois.

Bon sinon, y'a encore quelques points sur lesquels je vais pas disserter pendant des siècles. J'apporterai deux ouvertures au débat : le budget d'un film qui irrémédiablement modifie un scénario ( on va pas aborder un Michael Bay comme un film indé à la Carpenter ) et aussi tout ce qui peut inspirer et rentrer en compte dans le rythme de la chose, comme la musique par exemple. Qu'on pense à un Tarantino ou Convoy de Sam Peckinpah.

Finalement, je pense plutôt être dans la mouvance américaine du scénario dans la façon dont je l'ai étudié. Et le scénario reste très simple par là bas : on écrit ce qui se passe dans sa salle de cinéma mentale puis on voit comment on peut l'améliorer.

Après scénario simple ou simpliste, tout dépend des matériaux qui ont inspiré le scénariste, de ses envies, de ses objectifs, de son style etc. Limite c'est la face imergée de l'iceberg. Peut être que le scénariste ne sait même pas à l'avance ce qu'il va raconter, ni dans quel ordre il va le faire. C'est pour ça que ça me paraît un peu difficile de répondre à ce débat si on prend pas en compte le fait qu'à chaque scénariste correspond une manière d'écrire, et que donc on ne pourra jamais y donner de réponse satisfaisante.


Enfin je sais pas si j'ai été claire mais l'orientation est : chacun son style, on peut pas poser de but en blanc une question aussi générale mais on peut le faire pour chaque scénario mis en jeu sweat.gif Ceci reste que mon avis de trou du cul hein. laugh.gif
Elego
Donc en gros : l'analyse ça sert à rien, il faut "sentir" le matériaux ?

Je suis pas totalement en désaccord avec ça, nombre d'analyses que j'ai lu me semblaient être de la branlette intelectuelle. Cette année en classe ciné (j'ai 17 ans hein, je viens juste d'avoir mon bac icon_mrgreen.gif ) je pouvais pas supporter toutes fois où on analysait des séquences de 2046, et que chacun y allait de sa petite analyse, de son petit commentaire sur la signification profonde de la scène.

Mais l'angle que j'ai voulu aborder n'est pas du tout l'angle symbolique mais l'angle technique, méthodologique de la narration. Rien à voir avec ce que représente la quête de Luke Skywalker (désolé de rester sur star wars mais je suis à fond dedans en ce moment...promis demain je passe au seigneur des anneaux icon_mrgreen.gif ) mais comment Lucas scénariste présente le personnage et introduit sa quête.

Evidemment que quand il écrit l'arrivée de Luke, il se dit pas "ok alors il faut que je présente le personnage en moins de 20 secondes" (quoique...), mais qu'au fil des réécritures il a trouvé une manière plus fluide et plus naturelle de le présenter, et au bout d'un moment il s'est dit "bon, là cette scène va bien, passons à autre chose".
Mais il n'empêche que maîtrisée à 100% ou pas, cette scène fonctionne parce-que elle est très efficace, naturelle, claire et limpide.

Voili voilou wink.gif
Rom1
CITATION
j'ai 17 ans hein, je viens juste d'avoir mon bac


Tu me redonnes foi en la jeunesse, p'tit con.
Elego
CITATION(Rom1 @ 03 7 2007 - 13:45) *
CITATION
j'ai 17 ans hein, je viens juste d'avoir mon bac


Tu me redonnes foi en la jeunesse, p'tit con.


wub.gif
Elhim
C'est clair qu'un scénario de toute façon n'est qu'une base. Après tout dépend de ce quand fait un réalisateur, voir les producteurs.

Un exemple récent est Les Fils de l'Homme. En soit, l'histoire est simple, mais il y a un background qui est fortement développé et qui fait pour le coup la force du film. Car quasiment tous les messages diffusés par Cuaron sont dans l'arrière-plan. D'ailleurs la plupart des gens qui m'ont dit qu'ils n'avaient pas aimé le film sont ceux qui n'ont pas fait attention à tous les détails laisser par le réal.

Il n'y a qu'a regarder A l'intérieur. Le scénario est simpliste mais subit un traitement efficace.
Kaneeda
Pour en revenir a Starwars la présentation de Han Solo est aussi bien fichu que celle de Skywalker.. Et pourtant elle est sabordé dans l'édition speciale où il tue Greedo en légitime défense...du coup ceux qui ont découvert Starwars avec les éditions spéciales n'ont, amha, pas la meme vision du personnage de Han Solo que nous.
Ou comment Lucas détruit un de ses propres personnages pour en faire quelquechose de plus gentillet....a ce niveau de retouche, c'est un crime point barre !
Elego
CITATION(Kaneeda @ 03 7 2007 - 14:15) *
Pour en revenir a Starwars la présentation de Han Solo est aussi bien fichu que celle de Skywalker.. Et pourtant elle est sabordé dans l'édition speciale où il tue Greedo en légitime défense...du coup ceux qui ont découvert Starwars avec les éditions spéciales n'ont, amha, pas la meme vision du personnage de Han Solo que nous.
Ou comment Lucas détruit un de ses propres personnages pour en faire quelquechose de plus gentillet....a ce niveau de retouche, c'est un crime point barre !


Ah ben moi j'ai vu que les versions retouchées de 1997 et la réédition récente. Avant il le tuait direct ?
Kaneeda
Han solo sort lentement son flingue de l'étui, le cache sous la table et pendant que Greedo continue son blabla, Han le flingue direct sans que l'autre réagisse et s'en va comme si de rien n'était....
Bref il est moins sympa !

Et ca dit étudier Starwars sans avoir vu les VRAIS VERSIONS !!!! franchement !! lol
L'archiviste
CITATION(Elego @ 03 7 2007 - 14:23) *
Ah ben moi j'ai vu que les versions retouchées de 1997 et la réédition récente.
T'as jamais vu Star Wars ?
Chope-le toi, tu vas halluciner !
icon_mrgreen.gif

(je déconne à peine)
Elego
Je vais essayer de réparer mon erreur sweat.gif
stan corben
Résumé des épisodes précédents:
--Pour qu'une histoire fonctionne (qu'elle plaise?), faut un scénario clair limpide dans tout ce qu'il "montre", décrit, suggère ,avance.
(un pitch c'est la synthétisation d'une fiction de la façon la plus concise qui soit ,il"vend"l'histoire).
--Pour qu'un scénario fonctionne (qu'il se vende?) faut un "réalisateur", quelque peu inspiré derrière la caméra.
Le reste c'est des "habillages" de scénaristes qui peuvent orientés(ou pas), suivant leur façon de décomposer l'action (tous les scénaristes ne sont pas doués pour l'écriture de certaines scénes) et suivant aussi leurs prédispositions mentales à l'univers proposé.
En b.d, certains scénaristes, exécutent, eux mèmes, des brouillons des futurs planches, en positionnant déja l'action, afin tout simplement que le dessinateur puisse comprendre ce que lui veux précisément
--Les "habillages" des réalisateurs peuvent gommer,re-interpréter des scénarios par rapport à leur sensibilité, et leur expérience ( à 50 ans on connait plus de parades à certaines scènes casse-gueule, qu' à 35ans).
Viennent se greffer (aussi), le genre que l'on veut donner à l'histoire (drame, polar, thriller)...mais vaut mieux le savoir des le début ou alors gaffe...

l'exemple de star-wars est sympathique, Lucas a compris la manoeuvre, mais faut relativiser, ...dans le genre, l'héros est toujours montré en action...

En gros tout est infini, mais le résultat est unique...



ps: un scénario n'est qu'un outil dans la fabrication d'une oeuvre...
Rinaldo
CITATION(stan corben @ 03 7 2007 - 14:43) *
Résumé des épisodes précédents:
--Pour qu'une histoire fonctionne (qu'elle plaise?), faut un scénario clair limpide dans tout ce qu'il "montre", décrit, suggère ,avance.
(un pitch c'est la synthétisation d'une fiction de la façon la plus concise qui soit ,il"vend"l'histoire).


Je veux bien mais alors : comment on explique la réussite artistique du grand sommeil ?
L'exception qui confirme la règle ?
(je voudrais pas dire une banalité en affirmant qu'il n'y a pas de règles mais des partis pris et une qualité d'écriture plus ou moins bonne mais j'ai rien de mieux qui me traverse la tête là tout de suite...)
L'archiviste
CITATION(stan corben @ 03 7 2007 - 14:43) *
l'exemple de star-wars est sympathique, Lucas a compris la manoeuvre, mais faut relativiser, ...dans le genre, le héros est toujours montré en action...
... et en réaction.
Ca reste la seule façon à peu près censée de faire exister un personnage; il se définit aux yeux du public par ce qu'il fait, ses désirs conscients et/ou inconscients et sa façon de réagir et de surmonter les épreuves qui le séparent de son but. Donc forcément l'action.
Sinon, l'autre option, c'est que le comédien se pointe face caméra et dise au public : "Bonjour, je m'appelle Steve. Mon rêve dans la vie est de devenir pilote d'avion mais en fait inconsciemment ce que je cherche c'est la maîtrise, car je n'ai jamais pu faire face à mon désequilibre psychique suite à la séparation de mes parents et la mort accidentelle de mon frère. Et là, tout en vous le disant, je réalise la nature de mon problème, donc le film est fini vous pouvez rentrer chez vous."

L'exemple de la scène de présentation de Luke donné par Elego en page précédente est un cas d'école. On nous présente un quidam dans son quotidien et, en quelques secondes, nous savons qu'il est le héros, quel est son nom, son métier, sa situation familiale, ses conditions de vie, son caractère (vif, volontaire, obéissant, consciencieux) et tout celà sans que le spectateur ait l'impression qu'on lui enfonce les infos dans la gorge puisqu'il les déduit de la situation présentée.

Et la réaction de Rob Van Anna en haut de page suivante est aussi un cas d'école lorsqu'il déclare que tout ceci n'est qu'une "simple représentation de la vie". La sienne, peut-être, mais pas la mienne. Moi j'ai un peu de mal, quand je croise une personne étrangère qui ne s'adresse pas directement à moi, à déduire en 10 secondes son nom, son métier, sa situation familiale, ses conditions de vie et son caractère.
J'ai aussi un peu de mal avec le "faut arrêter d'intellectualiser des choses qui à la base ne sont pas et sont beaucoup plus simples que ce qu'on veux bien leur attribuer". Désolé, mais quand un Andrew Stanton reprend à zéro 208 fois son script, je me dis que la simplicité d'un Finding Nemo représente effectivement la fin mais certainement pas les moyens. Et quand on passe deux ans de sa vie devant un clavier, je crois qu'il se produit des évènements dans le cerveau qu'on peut raisonnablement appeler un "cheminement intellectuel". Après, il faut s'accorder sur la signification du terme "intellectuel", et j'ai l'impression qu'Elego l'a tout à fait compris lorsqu'il admire ce passage de Star Wars.
Quant au mot d'ordre américain qui se résumerait à "écrire à l'instinct", là je me permets de pouffer un peu. On est bien en train de parler du pays où 90% des apprentis scénaristes se refilent les bouquins de Robert McKee, et où ses séminaires font salle comble en plein coeur d'Hollywood (50 000 personnes recensées à ses dires) ? Apparemment, l'instinct aime bien se ressourcer à la méthodologie et à la discipline...
stan corben
(Je n'ai pas revu le film dernièrement)...

Le Métrage est un film noir, dense et tres sombre, il est vrai que l'histoire est assez alambiqué...Hawks a avoué que lui méme ne comprennait pas l'histoire,... mais l'important c'était l'ambiance, l'atmosphére du moment... ( on comprend la scene sur le moment,...tres peu au dela)...

Rinaldo
De toute façon, on s'en fout un peu de savoir si un scénar est écrit à l'instinct ou pas. Enfin non, parce que c'est toujours intéressant de connaitre les conditions d'élaboration d'un film mais ça ne nous empeche pas de considérer le résultat à l'écran et d'essayer de comprendre pourquoi telle ou telle manière d'organiser des évenements ou telle représentation est efficace (ou pas) et quels effets ils produisent sur les spectateurs.
Elego
CITATION(Rinaldo @ 03 7 2007 - 15:57) *
De toute façon, on s'en fout un peu de savoir si un scénar est écrit à l'instinct ou pas. Enfin non, parce que c'est toujours intéressant de connaitre les conditions d'élaboration d'un film mais ça ne nous empeche pas de considérer le résultat à l'écran et d'essayer de comprendre pourquoi telle ou telle manière d'organiser des évenements ou telle représentation est efficace (ou pas) et quels effets ils produisent sur les spectateurs.


Disons que savoir comment les scénaristes travaillent/fonctionnent ça aide pour comprendre comment les scénarios sont écrits et pourquoi certains sont plus efficaces que d'autres.
Et puis rendre hommage au travail monstre qu'ils font ne fait jamais de mal, à en entendre certains les films réussis sont des coups de chances, alors qu'il s'agit d'une masse de travail énorme.
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