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Version complète : Remettre les films dans leur contexte pour les juger ?
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LMD
Suite à une discussion sur le sujet Les Perles de la Critique sur l'importance du savoir factuel d'un critique dans le cadre de son travail (la discussion ici) et à d'autres débats plus récents sur d'autres forums (que l'on citera, si cela ne pose pas de problème...), je me suis posé cette large (vague...) question.

Faut il remettre les films dans leur contexte pour les juger?
[inclure ici un dramatic chipmunk]

Voici un exemple de discussion plutôt classique, sur ce forum et dans la vie:
CITATION(john mclane @ 06 3 2006 - 11:49) *
CITATION(El Pistolero)
filmé avec les pieds, j'ai pas pu regardé plus de 15 minutes...


C'est du petit cinéma underground, c'est pas plus mal filmé ni plus mal joué que les premiers John Waters par exemple.

Ca a le charme rétro du cinéma anticonformiste des seventies, c'est plutot bien je trouve. Il faut se remettre dans le contexte de l'époque et voir tout ce que cinéma avait de contestataire (dans le ton et dans la forme) et la vision dérangeante qu'il donnait des USA.
Et puis le grain de l'image, la lumière cramoisie, l'exposition des corps charnus, ça crée une sensualité à l'image qui continue de fasciner. Je trouve.


Je pense que vous êtes tous relativement familier avec ces postulats, donc je ne les résume que sommairement:

- Le premier postulat, c'est qu'une œuvre d'art se comprend dans son contexte. Elle n'a pas été crée dans un néant complet, mais à une époque précise. Et au moment de sa conception, elle se plaçait dans la continuité (ou en opposition) d'autres œuvres qui la précédait, dans une société donné dans le temps et l'espace avec ses propres préoccupations, ses opinions majoritaires, et on peut continuer de manière infinie ainsi... Un exemple parlant pourrait être celui du film indien Bhoot. Pour le lecteur de Mad Movies, le film peut paraitre particulièrement peu original dans son scénario ou ses effets. Mais si on se replace dans le contexte, à savoir un film destiné en priorité (voire en quasi exclusivité) au marché indien (et de pays consommant de ces films), marché ou la présence du cinéma d'horreur est très marginale, on comprend mieux alors le pourquoi du comment de la conception et de la perception.

- La position "opposée" (ou plutôt complémentaire?), c'est que le film/œuvre d'art existe en tant qu'objet unique valant pour lui même et que sa qualité peut (voire doit!) être jugée hors du contexte. Les écrits philosophiques de la Grèce Antique ont frappé les lecteurs de leur pertinence et ce malgré une contextualisation assez limité. Plus proche de nous, un film comme Freaks continue d'être considéré comme efficace, pertinent et agréable même par des gens dont la connaissance de l'histoire du cinéma (en particulier autour de ce film) est limitée. L'aboutissement ultime de ce raisonnement est qu'une grande œuvre d'art prouve sa qualité en brillant hors contexte, en étant intemporelle.


Ces bases étant posées, il me parait clair qu'on ne tranchera pas aujourd'hui cette difficile question (à moins de penser que le forum Mad Movies soit capable de soudainement renvoyer tous les historiens de l'art des derniers millénaires à leurs chères études...), et ce n'est d'ailleurs pas le but. D'ailleurs je me contenterai de soulever quelques remarques que m'inspirent ces deux positions (surtout la première d'ailleurs) qui sont au final plus souvent complémentaires qu'opposées (car on peut se demander si le jugement hors contexte et l'analyse de l'oeuvre par rapport au contexte ne sont pas finalement deux domaines distincts).

Est il possible de réellement se (re)mettre dans un contexte? Je n'ai jamais vécu dans les années 70, par exemple: je suis donc tributaire de témoignages et de documents pour essayer de construire ce "contexte". Pour vous rendre compte de la difficulté de la chose, prenez une action importante que vous avez effectué ou une quelconque production plus ou moins artistique que vous avez réalisé (dissertation, article, œuvre d'art, message un peu long sur un forum internet...). Imaginez que dans 50 ans pour une raison quelconque, une personne de 25 ans tente d'analyser cet acte ou ce produit et se base principalement sur "le contexte" des années 2000 tel qu'il sera défini dans "le contexte de 2050" (ça va vous suivez? icon_mrgreen.gif ) et tente de se mettre à votre place ou à celle d'un de vos lecteurs. Il y a quand même une marge d'erreur possible assez importante... Evidemment, dans ce cas précis, je prends une situation extrême puisque l'objectif c'est rien de moins que de se mettre entièrement dans la tête d'un autre à 50 ans d'écart (chose qu'on arrive même pas à faire dans le présent, voire pour soi même). Cet exemple par l'absurde me sert à mettre en lumière l'imprécision possible du "contexte" tel qu'on le construit, surtout dans l'analyse d'un objet aussi complexe et intime (tant pour le créateur que le spectateur) qu'une œuvre d'art.

En général, l'affirmation n'est pas aussi ambitieuse: en réponse à une personne qui trouve les effets spéciaux du King Kong de 1933 mauvais, on lui "demandera de remettre dans le contexte", c'est à dire de comparer avec quelques autres productions de la même époque. Et souvent il ne s'agit que de brosser à gros trait une époque donné (de manière un peu arbitraire) ou de donner une liste de films contemporains auquel comparer celui qui est concerné (pour en souligner son [anti]conformisme ou ses particularités).
Pour des questions un peu plus complexes on est obligé de se replonger dans la documentation (témoignages, interviews, travaux d'historiens, critiques de l'époque, etc...). Ca tombe bien, le cinéma est un art tout récent et la documentation semble abondante (on ne peut en dire autant de tous les autres arts). Après tout, reconstruire une réalité (ou au moins établir des faits) depuis des documents et des sources parcellaires est le lot de tous les historiens. Je suis sur que certains avanceront qu'il est tout à fait possible de reconstituer, au moins en partie, le contexte d'une époque (a fortiori pas si éloignée), je n'ai aucune réponse définitive à la question.

En se limitant strictement à l'histoire des films du point de vue du spectateur, même si la re-contextualisation est possible, peut on attendre de l'immense majorité des spectateurs une telle capacité? Même l'exemple basique du King Kong de 1933 n'est probablement applicable qu'a la communauté cinéphile, qui forme déjà une minorité. Est ce pour autant qu'une œuvre est incapable de toucher un large public? Bien sur que non, mais on peut rétorquer que le film est avant tout conçu pour le public de son époque (avec une exploitation en salle, video, TV dans les 2, 3 ans suivants la fabrication) et/ou sur des thèmes voulus universels (l'amour, pour citer le plus emblématique). Le passage au statut de classique serait obtenu à travers un mélange aléatoire de génie et de chance.

Le jugement des "non-initiés" est il à jeter aux orties pour autant? L'art étant avant tout une affaire de perception intime, n'est ce pas justement la capacité d'une œuvre à nous toucher, indépendamment d'un quelconque contexte, qui est importante?

Et bon là, je sais pas trop comment finir donc je vous laisse broder. sweat.gif
Mason
ca c'est du debat

pour apporter ma modeste contribution au sujet , je dirais , pour repondre d'abord sommairement a la question du topic , que non , il n'est pas forçémment nécéssaire de remmetre les films dans leur contexte pour les juger.

l'exemple pris , king kong 1933, illustre plus pour moi le coté " forme " avant le côté " fond". on peut le prendre comme un excellent film d'aventure, ce qu'il est a la base. il est vrai que decouvert maintenant par quelqu'un qui n'aurai jamais vu un film de cette époque, il pourrait preter le flanc a la critique facile ( ouhh l'effet playmobil des indigenes, etc..) ; quand bien meme, passé outre l'aspect technique du metrage, il possede la qualité ( wink.gif ) d'etre intemporel dans son propos ( un film d'aventures avant tout, avec des personnages universellement identifiables ( le marin, le cineaste etc...) dans des situations extraordinaires et eternellement over the top , quelle que soit l'époque ( un singe géant , des dinosaures , sur une ile inconnue..que ce soit en 2008, 1933 ca reste du fantastique)l

pour avancer dans mon opinion, le sujet m'évoque un film en particulier pour illustrer mon propos.

Orange mécanique.
tout le monde l'a vu, tout le monde sait de quoi ca parle. on est tous au courant de l'accueil assez mitigé que le film a reçu quand il est sorti en 71 ( censure, mise en avant de l'ultra violence du film)

la pour le coup c'est plus le fond qui m'interesse. pour jouer le jeu de l'argument de base..alors oui remettons le film dans son contexte. année 71. le film sort, et là a l'époque on decouvre, sans forcemment avoir été prevenu , un viol , de "l'ultraviolence, des scenes de nudité..
alors oui ca a choqué. pas de doute la dessus.

maintenant, remmetons le film dans le contexte actuel, en 2008. je pense que l'ultra violence et le coté derangeant du film ne sera plus le meme. le Cinéma a produit pire depuis, en matiere de violence graphique et full frontal. le film est bien marqué 70's ( synthé a gogo, esthetique 70's a s'en faire péter les yeux) mais la mise en scene de kubrick est toujours aussi magistrale, ( c'est mon point de vue)

remis dans son contexte ( année 70) ca a du etre une belle baffe, du niveau d'un irreversible, en moins glauque et plus stylé ( là encore ca n'engage que moi, c'est juste pour illustrer le propos), le flower power a du en prendre un coup. là je pense que ca releve plus de la forme que du fond. pris de plein fouet, on retient plus les scenes de sexe, de violence etc. que le propos même du film.

et c'est là que je reviens au sujet, remettre les films dans un contexte pour les juger. pour ce qui est d'orange mecanique , je pense que le vrai sens du film, son propos , saute plus aux yeux maintenant , en 2008 ( hors contexte), qu'à l'époque. passée la violence du film, on peut s'interesser aux multiples sujets traités par kubrick, là on touche au fond du film, à savoir le film se présentant comme une illustration de la fascination pour la violence, illsutrer l'aggressivité etc.comme etant une maladie etc...appellez ça prendre du recul...

cela dit , on peut aussi trouver pleins d'exemple pour illustrer le contraire ( le contexte est toujours utile pour juger), la liste de films ancrés dans une époque , avec un fond en adequation avec la forme et le contexte est sans fin.


je sais pas si j'ai été tres clair... wink.gif

kitano
Bon comme je crève de chaud là (même à 23:39) je me permet aussi d'y aller de mes courants d'air... sweat.gif

C'est une question très intéressante qui rejoint un peu l'autre débat récurrent sur la façon dont certains notent les films (donc la façon de les juger).

J'ai envie de dire que ça dépend de ce qu'on appelle juger un film...
Pour moi il y a deux façon d'analyser un film :

soit tu le juge uniquement sur l'effet que le film a sur toi et là qu'importe le contexte dans lequel le film est sortit soit tu aimes et le trouves génial soit tu ne l'aimes pas. (là on est dans le purement subjectif )

soit tu le juge (ou tu essayes du moins) de manière plus objective sur sa valeur intrinsèque et sur des critères plus techniques donc là forcément t'es un peu obligé de le recontextualiser.

L'idéal étant de faire les deux ce qui permet de dire qu'on adhère pas du tout à tel ou tel film sans pour autant lui dénier ses qualités, son originalité ou son ton provocateur pour l'époque.

Le truc c'est qu'on a souvent ce débat parce qu'on a les deux manières d'analyser un film qui se confrontent alors qu'elle devrait se compléter, ex l'exorciste :
- c'est nul j'ai même pas eu peur je me suis fait chié c'est surrestimé.
- t'es fou à l'époque on a sortit des gens sur des civières devant sa projection.

Bref moi ce que j'en pense c'est que contexte ou pas contexte ce qu'il faut pour juger un film c'est l'humilité.
melvinpekatre
CITATION(kitano @ 29 7 2008 - 23:46) *
Le truc c'est qu'on a souvent ce débat parce qu'on a les deux manières d'analyser un film qui se confrontent alors qu'elle devrait se compléter, ex l'exorciste :
- c'est nul j'ai même pas eu peur je me suis fait chié c'est surrestimé.
- t'es fou à l'époque on a sortit des gens sur des civières devant sa projection.


C'est vrai mais il faut prendre en compte que remettre un film dans son contexte pour le juger, c'est d'abord le voir au cinéma...
L'exorciste je l'ai vu au début des années 90 en salle, je le connaissais déjà, comme l'essentiel de la salle à mon avis, pourtant on a tous marché à fond. Pareil pour Massacre à la tronçonneuse vu en salle quelques années plus tard, le film fonctionne magistralement et m'a collé une baffe de ouf, alors que je le connaissais par coeur en vhs...

CITATION
et c'est là que je reviens au sujet, remettre les films dans un contexte pour les juger. pour ce qui est d'orange mecanique , je pense que le vrai sens du film, son propos , saute plus aux yeux maintenant


C'est carrément vrai, mais remettre le film dans son contexte, c'est aussi prendre en compte le contexte socio culturel de l'époque, sans vouloir philosopher, il faut s'accorder sur le terme "juger"...
Si juger c'est donner son avis sur la qualité du film, c'est à mon avis intemporel. On a tous été soufflé gamin en découvrant les Temps modernes de Chaplin par exemple.
Si juger c'est élaborer une analyse du film, au delà de ses caractéristiques techniques, il faut probablement prendre en compte les tenants et aboutissants, et donc remettre le film dans son contexte, le comment, le pourquoi... Juger Top Gun par ex, nécessite de s'intéresser au système de production de fictions militaires...
melvinpekatre
CITATION(LMD @ 29 7 2008 - 17:44) *
Est il possible de réellement se (re)mettre dans un contexte? Je n'ai jamais vécu dans les années 70, par exemple: je suis donc tributaire de témoignages et de documents pour essayer de construire ce "contexte".


Ceci dit, pour un film sortant maintenant, l'ensemble de la population a t'elle la même perception du réél, de l'époque ?
Entre un berger basque de Donibane Garazi et un étudiant à Paris 11 il y a un monde... Certaines personnes peuvent se sentir concernées par un film comme la Bataille d'Alger aujourd'hui, alors qu'à l'époque bien des gens en étaient très loin.
Remettre dans le contexte peut être une action d'ordre contemporaine. Les films sur l'Irak sortis l'année dernière demandent au public français une mise dans le contexte américain, regarder Zombie en 78 ou en 2008 demande au même public de se projeter dans un contexte particulier.

CITATION
En général, l'affirmation n'est pas aussi ambitieuse: en réponse à une personne qui trouve les effets spéciaux du King Kong de 1933 mauvais, on lui "demandera de remettre dans le contexte", c'est à dire de comparer avec quelques autres productions de la même époque.


Oui mais si le film fonctionne c'est au delà de ses trucages. Et quelqu'un intéressé de voir un film de monstre peut se sentir frustré par les effets spéciaux de KK et lui préférer Godzilla d'Emmerich. Toutes les attentes sont dans la nature. Savoir que le film était réussi pour son époque, ça intéresse les cinéphiles, pas forcément tous les gens qui matent des films, qui se foutent totalement de tout ça et veulent juste un divertissement.
LMD
CITATION(melvinpekatre @ 30 7 2008 - 00:45) *
Ceci dit, pour un film sortant maintenant, l'ensemble de la population a t'elle la même perception du réél, de l'époque ?
Entre un berger basque de Donibane Garazi et un étudiant à Paris 11 il y a un monde... Certaines personnes peuvent se sentir concernées par un film comme la Bataille d'Alger aujourd'hui, alors qu'à l'époque bien des gens en étaient très loin.
Remettre dans le contexte peut être une action d'ordre contemporaine. Les films sur l'Irak sortis l'année dernière demandent au public français une mise dans le contexte américain, regarder Zombie en 78 ou en 2008 demande au même public de se projeter dans un contexte particulier.


Oui évidemment mais je n'ai pas insisté sur ce point pour ne pas emberlificoter mes observations. Mais faut il se mettre dans la peau d'un américain quand on va voir un film de ce pays? Vu la vision caricaturale des citoyens de ce pays qui est assez répandue en France... C'est aussi au film d'être capable de me faire "voyager" et d'arriver à provoquer cette projection (astrale! Raaahhh) dans la tête d'un autre (le réa déjà).
Remets toi dans le contexte: mais lequel?

CITATION
Oui mais si le film fonctionne c'est au delà de ses trucages. Et quelqu'un intéressé de voir un film de monstre peut se sentir frustré par les effets spéciaux de KK et lui préférer Godzilla d'Emmerich. Toutes les attentes sont dans la nature. Savoir que le film était réussi pour son époque, ça intéresse les cinéphiles, pas forcément tous les gens qui matent des films, qui se foutent totalement de tout ça et veulent juste un divertissement.


Il ne s'agissait pas d'un jugement de fond sur le film mais d'un exemple: Pour les "non-cinéphiles", je suis pas certain qu'ils se ruent sur les DVD des films des années 30. Y a qu'a voir comment la TV arrete de diffuser les films après une certaine date (en dix ans, certains films multi-rediffusés datant des 70 ont disparu des grandes chaines)
jigsaw
J'ai pas trop le temps là mais NON milles fois non.

Le contexte est utile si on souhaite s'interesser à l'oeuvre ou l'analyser mais il est inutile à l'appréciation.
liam
Salut,

savez-vous s'il existe une timeline du ciné du 20ème siècle ?
Critiques et reflexions sur les grands films qui ont marqués les esprits sont facilement trouvables sur le net.
Ce qui m'interesse est de d'avoir une vue d'ensemble. Je m'explique. J'ai vu Mad Max recemment. J'ai voulu en savoir plus sur le film et en allant de pages en pages sur le net j'ai réalisé que la même année, 1979, un spectateur avait pu découvrir en salle un Georges Miller, un Woody Allen (Manhanttan), un Ridley Scott (Alien), un Coppola (Apocalypse Now) un Polanski (Tess)... Rien que ca... En 1980, Shining, Elephant man, Raging Bull...
On trouve des résumés par année mais pas de vue complète. Savez-vous si ca existe ?

Merci de votre aide.
DarK ChoueTTe
je sais pas si un truc aussi (si fait de façon quasi-exhaustive) existe, et ça prendrait sacrément de temps pour être fourni de façon intéressante.
Enfin, sauf si tu ne parles que d'une liste avec noms et années. Auquel cas, ce que je connais qui s'en rapproche le plus serait le classement d'IMDB par décades (dans la colonne de gauche)
Enfin, c'est un début.
roscharch
Toujours sur IMDB, ce qu'il y a de plus complet, c'est encore le classement par année.
(mais du coup, c'est peut-être trop complet....^^ Sinon la solution de Mr chouette est intéressante, malgré the dark knight classé comme meilleur film de tous les temps... icon_mrgreen.gif )
DarK ChoueTTe
Nan nan je précisais dans la colonne de gauche de cette page (y'a plusieurs possibilités de classement dont "by decades"...)
(putain ouais Dark knight ça commence à m'intriguer, à ce point là...IMDB n'a jamais fait office de référence vu la disparité des votants mais tout de même)
LMD
Pour la France et les films récents, Allociné est un outil assez correct pour cela en proposant les archives des différentes sorties cinéma semaine par semaine.
IMDB propose des listes de films par année classés par date de sortie (par exemple voici la liste pour l'anée 2000), mais cela ne propose pas une vue rapide des choses. Il y a d'autres critéres de recherche par année qui peuvent aider à faire le tri (notes des lecteurs et box office) mais c'est bien sur assez limité. Il faut probablement compléter avec des infos prises sur d'autres sites, et ce sont souvent les sites spécialisés dans les questions d'exploitations (BoxOfficeMojo ou pour la France et sur papier, les archives du Film Francais/Ecran Total) qui ont les infos les plus fiables à ce sujet. Au niveau d'exhaustivité que tu demandes, tu ne couperas pas à un certain "effort" à fournir dans la recherche.

Anthologie et dictionnaires ciné propose surement des choses équivalentes, mais avec moins de détails et un choix des films toujours partial dans un sens ou l'autre.
tonton
alors moi je dirais qu'il faut absolument se remettre dans le contexte d'un film pour l'apprécier à sa juste valeur.
Regarder "Citizen Kane" aujourd'hui comme on regarderait le dernier Tony Scott, c'est passer à côté de ce qui fait (entre autres) de "Citizen Kane" un chef d'oeuvre. C'est passer à côté des inventions de Welles.
Regarder un Kurosawa comme on regarderait un drame français, sans prendre en compte les spécificités de la culture Japonaise, c'est risquer de ne pas comprendre les tenants et les aboutissants du film.
Tout ça pour dire, qu'on ne regarde pas non plus un Picasso comme on regarderait un Michelangelo.

Mais kitano a très bien résumé la chose, si on ne recherche que le divertissement, on s'en fout du contexte (quitte à passer à côté de quelque chose).

EDIT: et se "remettre dans le contexte", ce n'est pas voir "Halloween" en pattes d'ef, c'est s'intéresser au film avant de le voir, le "situer" dans l'histoire du cinéma, ou au pire être indulgent avant d'en savoir plus.
gwegz
Tiens pour mettre dans ton premier post:

Elego
Je participe en coup de vent juste pour dire que je ne pourrais être moins d'accord avec ça :

CITATION(tonton @ 03 8 2008 - 10:03) *
Regarder un Kurosawa comme on regarderait un drame français, sans prendre en compte les spécificités de la culture Japonaise, c'est risquer de ne pas comprendre les tenants et les aboutissants du film.


Un film se doit d'être universel, si pour le comprendre il faut se plonger dans la culture dans laquelle il a été fait, c'est que quelque part y a un problème. ça veut pas dire qu'on ne peut pas faire des films sur des spécificités culturelles (tradition, situation géopolitique particulière, religion, Totoro) mais simplement que dans la mesure où un scénariste doit trouver ce qu'il y a d'universel dans chaque sujet, eh bien connaître les spécificités culturelles entourant un film ne doit pas être obligatoire.

(je précise que c'est en petit adolescent ne connaissant rien de rien à la culture japonaise, commençant le film à 01H00 dans une copie de mauvaise qualité avec des st anglais à une époque où je comprenais une phrase sur cinq, que je me suis pris une énorme baffe en regardant Les sept samouraï^^)
ouaisbiensur
CITATION(Elego @ 03 8 2008 - 11:19) *
Je participe en coup de vent juste pour dire que je ne pourrais être moins d'accord avec ça :

CITATION(tonton @ 03 8 2008 - 10:03) *
Regarder un Kurosawa comme on regarderait un drame français, sans prendre en compte les spécificités de la culture Japonaise, c'est risquer de ne pas comprendre les tenants et les aboutissants du film.


Un film se doit d'être universel, si pour le comprendre il faut se plonger dans la culture dans laquelle il a été fait, c'est que quelque part y a un problème. ça veut pas dire qu'on ne peut pas faire des films sur des spécificités culturelles (tradition, situation géopolitique particulière, religion, Totoro) mais simplement que dans la mesure où un scénariste doit trouver ce qu'il y a d'universel dans chaque sujet, eh bien connaître les spécificités culturelles entourant un film ne doit pas être obligatoire.

(je précise que c'est en petit adolescent ne connaissant rien de rien à la culture japonaise, commençant le film à 01H00 dans une copie de mauvaise qualité avec des st anglais à une époque où je comprenais une phrase sur cinq, que je me suis pris une énorme baffe en regardant Les sept samouraï^^)


Oui mais rien qu'en restant chez Kurosawa, mater le château de l'araignée sans avoir même une petite idée du théâtre nô, il y a de quoi se demander à quoi carburaient les protagonistes, c'est pas si évident que ça.
Elego
Là tu parles du style interne au film, tonton parlait de la culture en général (avec je suppose des trucs comme la construction de la famille, le contexte social, politique, etc.).

Enfin je crois unsure.gif (*légerdoute*)

Pour le château de l'arraignée, je l'ai vu sans rien savoir du théâtre nô (d'ailleurs je n'en sais toujours rien), et passé les premières minutes où ça fait un peu bizarre, je m'y suis fais assez vite (le film ayant une vraie logique interne, au fur et à mesure que les éléments se mettaient en place tous mes doutes s'effaçaient au point de ne plus me poser de questions lors de la fin).
tonton
J'ai mis Kurosawa un peu au pif
Je ne veux pas dire que ne pas connaître la culture japonaise empêche d'apprécier les films de Kurosawa, juste qu'on risque de passer à côté de subtilités (subtilités qui peuvent parfois expliquer les motivations de personnages)

Un exemple plus précis et plus parlant: "HitoKiri" de Gosha. Perso ne connaissant pas énormément la culture ni l'histoire japonaise, je passe à côté de quasi tout ce qui fait l'intérêt du film, les réactions des personnages m'échappent parce que je ne les comprends pas. Donc, avant de me dire que c'est n'imp', avant de me dire "bha, j'aime pas", je me dis qu'il me manque sûrement les clés pour apprécier le film à sa juste valeur, j'accepte le fait de ne pas avoir le "niveau", je m'intéresse (via ce forum par exemple) à ce que raconte le film, au contexte historique décrit, et pis je le remate.

Et donc je suis totalement pas d'accord avec le fait qu'un film se doit d'être universel (mais c'est un autre sujet).
(et au final, pour HitoKiri toujours, le film raconte quelque chose d'universel, mais à partir de spécificité culturelles)
Lord-Of-Babylon
Je crois que la mise dans le contexte c'est d'avantage un processus qui consiste à éclater tout les préjugés que tu peux avoir au fur et à mesure que tu grandis. J'ai pas l'impression qu'un gosse ai besoin de cela pour s'amuser devant un film quel qu'il puisse être. Par contre c'est un exercice obligatoire pour peu qu'on veuille aller au delà du plaisir de visionnage (pour autant qu'on oublie pas que cela ne doit pas en justifier les qualités ou les défauts) et à partir du moment ou tu t'en vas visiter des contrés que tu connais peu.
Elego
CITATION(tonton @ 03 8 2008 - 12:50) *
je me dis qu'il me manque sûrement les clés pour apprécier le film à sa juste valeur


C'est là où je suis pas d'accord, pour moi un film doit donner de lui-même toutes les clés pour pouvoir être apprécié (la difficulté résidant dans le fait de donner ces clés de manière invisible pour éviter de gâcher le plaisir de ceux qui les ont déjà).
Un film ça existe de lui-même, c'est un monde à part. Alors certes ça fait parti d'une culture, c'est influencé par son époque, par son mode de production, son public, etc. mais ça doit avant tout exister par lui-même (un scénariste ne reprend pas la réalité, il en créé une alternative qui reprend des éléments de la réalité mais en les réorganisant selon la logique interne du film et en leur donnant un sens particulier).
Après les influences on peut les étudier si on s'intéresse au cinéma en tant qu'histoire, qui a influencé, pourquoi y a ça dans tel film, tel style, tel type de récit dominant, etc. mais pour moi un film qui n'existe pas par lui-même, je trouve (je trouve) (j'ai dis je trouve) (pas taper) que quelque part c'est pas vraiment du cinéma (je n'ai pas vu HitoKiri).
Sinon je suis d'accord pour les subtilités à côté desquelles on peut passer, mais ça doit pas pour autant gêner la vision du film (on n'est pas obligé de tout comprendre pour apprécier un film, mais il faut que le coeur du film soit accessible).

Et quand je dis qu'un film doit être universel, ça veut pas dire abandonner toutes les spécifités culturelles de ses auteurs et/ou de son pays, mais c'est les utiliser et les réorganiser selon la logique interne du récit.

Après pour revenir au sujet, je pense que c'est une question d'ouverture d'esprit et d'"expérience" cinéphilique. Le gamin d'aujourd'hui qui voit Halloween ou Les dents de la mer et qui se dit "j'ai déjà vu ce film une bonne dizaine de fois et c'était moins lent !", ben qu'il pense ça si il veut, je vais pas aller lui taper dessus. Si après il continue de s'intéresser au cinéma, il finira bien par revenir à ces films et à les réévaluer, mais je pense pas qu'il faille lui dire "attention, ce film a 30 ans et a été copié des dizaines de fois, il faut se remettre dans le contexte de l'époque pour le juger à sa juste valeur", parce que là le spectateur va penser "je m'ennuie, ce film ne m'intéresse pas, mais ça a dû être un sacré choc pour les gens de l'époque quand même !", et va ainsi évacuer toute notion de plaisir (et je suis un grand partisan du fait que l'art vienne après le plaisir, l'inverse je trouve ça un peu...vain).

AMHA unsure.gif
Zorro
Complétement HS mais :
CITATION(DarK ChoueTTe @ 03 8 2008 - 03:57) *
(putain ouais Dark knight ça commence à m'intriguer, à ce point là...IMDB n'a jamais fait office de référence vu la disparité des votants mais tout de même)

J'ai lu la semaine dernière un article (me demande pas où, j'ai paumé le lien) qui expliquait que la place de numéro un du Dark Knight s'expliquait aussi par une baisse des autres films. Concrètement, Le Parrain, autrefois numéro 1, à reçu en quelques jours des milliers de 0/10 afin de le faire baisser dans le classement. Ce qui explique qu'il soit passé troisième derrière The Shawshank Redemption de Darabont alor qu'il avait été premier pendant plusieurs années.
Parallèlement, The Dark Knight a reçu des milliers de 10/10 (quasiment 130 000, soit 70% des votes) dont une bonne partie de spectateurs n'ayant pas encore vu le film, et qui s'en vantent en plus sur les forums.

Tout ça pour dire que les classements, c'est de la merde.

[/HS]
Dynamithe8
CITATION(Lord-Of-Babylon @ 03 8 2008 - 13:06) *
Je crois que la mise dans le contexte c'est d'avantage un processus qui consiste à éclater tout les préjugés que tu peux avoir au fur et à mesure que tu grandis. J'ai pas l'impression qu'un gosse ai besoin de cela pour s'amuser devant un film quel qu'il puisse être. Par contre c'est un exercice obligatoire pour peu qu'on veuille aller au delà du plaisir de visionnage (pour autant qu'on oublie pas que cela ne doit pas en justifier les qualités ou les défauts) et à partir du moment ou tu t'en vas visiter des contrés que tu connais peu.


Totalement d'accord. Et ça nous éviterait bien souvent des commentaires du genre "ça à mal vieilli" à propos de tout film de plus de 30 ans. Remettre un film dans son contexte, c'est bien évidemment faire l'effort de comprendre pourquoi celui-ci est considéré comme il l'est aujourd'hui. Et dans tous les cas, cela ne peut être que bénéfique pour quiconque veut se forger une culture cinématographique sinon exemplaire, au moins juste. Maintenant ce n'est clairement pas un exercice obligatoire mais montrer l'Exorciste à quelqu'un sevré aux teens movies et autres slashers décérébrés, pas sûr que cela rentre dans ses standards de qualités. Mais là on s'attaque à la perception d'une oeuvre et on attaque un autre terrain. Pour résumer, chacun est libre d'appréhender une oeuvre comme il l'entend, la replacer dans son contexte est vital pour en saisir toutes les subtilités liées à son époque.

Edit : J'ai pas lu les deux derniers posts, désolé si redite il y a.
shaman
CITATION
Un film ça existe de lui-même, c'est un monde à part


D'accord.
Pour continuer sur la piste de Hitokiri : c'est un chambara - film de sabre, donc un film qui navigue dans un genre avec ses codes et valeurs en les traitant à sa sauce (par chance, ici il les transcende). Ce qui nous amène à l'idée de "genre".

Comment peux-tu expliquer alors le nombre de films (de genre) qui ont été méprisé/ignoré par un large public/critique, mais qui pour une petite minorité se sont révélés être des Grands Films (et forcément, le consensus général a finit par les aimer) ?

À cause de codes (hermétiques ?), les films n'étaient pas universels (ce qui est d'autant plus étrange pour certains genres commerciaux) ?
(perso, j'ai aucune réponse à ça)

Peut-être que pour certains films, les genres & mythes ne correspondent simplement plus à notre époque - d'où l'incompréhension des symboles (?).

(je parle bien de codes propres à un genre, pas des codes inventés par des théoriciens intellectualisant, ex: quand un samouraï... un assassin tient son sabre comme un gros couteau, il y un décalage ironique - instinctif (?), pas une thèse masturbatoire).
Elego
CITATION(shaman @ 03 8 2008 - 14:24) *
Comment peux-tu expliquer alors le nombre de films (de genre) qui ont été méprisé/ignoré par un large public/critique, mais qui pour une petite minorité se sont révélés être des Grands Films (et forcément, le consensus général a finit par les aimer) ?


Si tu parles des Massacre à la tronçonneuse, Zombie et autres Mad Max, le mépris du large public et de la critique s'explique du fait des émotions qu'ils nous font ressentir (relativement désagréables) : les critiques et le grand public ne veulent pas forcément ces émotions-là, par contre le fan de genre est à la recherche de ces émotions.
Il y a aussi le rôle de l'apriori (film d'horreur => pour gamin, pas du cinéma => je vais prendre tous les aspects de ce film et m'arranger pour les tourner en dérision), l'autopersuasion peut avoir un très grand pouvoir, sans compter la pression sociale qui peut nous forcer (sans qu'on s'en rende compte) à avoir une certaine opinion d'un film.

Un film ça demande un certain abandon de soi, si on entre dans la salle en se disant que ça va être pourri et qu'on cherche la petite bête à chaque instant, y a peu de chance pour qu'on ressorte conquis.

Et si les MALT, Zombie et autres Mad Max sont restés, c'est parce que malgré tout ils parlent de l'homme, de l'humain, et en ça ils sont universels.

Pour les histoires de codes, je sais pas...un film comme Halloween qui a (quasiment ?) créé un genre peut paraître daté dans ses codes et devenir ainsi ultra-prévisible. Peut-être que des fois ça devient tellement gros qu'il est impossible de passer à côté pour juste s'intéresser "au film", c'est vrai.

CITATION
Peut-être que pour certains films, les genres & mythes ne correspondent simplement plus à notre époque - d'où l'incompréhension des symboles (?).


ça rejoint un peu ce que j'ai dis dans mon précédent post : si on considère un film comme un monde à part coupé de la réalité, alors il aura prit soin de se créer une logique interne et de faire en sorte de donner du sens à son réseau de symboles en interne (et non pas en utilisant les symboles d'une époque qui renvoient à quelque chose d'extérieur au film).
Un exemple tout bête c'est dans L'arme fatale 2 : Danny Glover s'étire le cou juste avant de tirer en plein coeur d'une cible. A la fin du film, quand il refait ce même geste, on sent ce qu'il veut dire sans avoir besoin de connaître les habitudes des très bons tireurs. Si dans 2000 ans il y a toujours des gens sur terre et qu'ils se décident de regarder le film, ils comprendront toujours ce geste, peu importe la culture dans laquelle ils vivront.
Adinaieros
Le truc c'est que je vois pas en quoi un film devrait forcément être intemporel et/ou universel ?
JE dis pas que c'est un mal hein ? mais pourquoi ça et pas autre chose ?
Le but d'une œuvre d'art n'étant pas quelque chose de clairement défini le fait de toucher le maximum de monde, de transcender n'est en rien un axiome pour moi.
Certes les films qui touchent a quelque chose de profonde de la nature humaine et qui arrive a être compréhensible par tout le monde, n'importe ou n'importe quand c'est très bien...mais en quoi un film qui ne parlerait qu'a une certaine catégorie de gens/cultures/sous-cultures/etc. ça serait forcément moins bien ?

Un film peut être réussi et très bon tout en étant culturellement obscur à plein de gens.
Ne serait ce que pour des raisons de rythme vu que celui ci varie énormément suivant les cultures et les époques.

Pour faire un parallèle musical qui vaut ce qu'il vaut, certaines musiques japonaises nous semblent discordantes car nous ne sommes pas culturellement habituées à entendre ce genre de sons/rythmiques.
Est ce pour autant rater ?


Partant de là, la question du contexte touche aussi du coup la question de l'universalité : si l'universalité est le But Ultime alors oui on s'en fout du contexte.
Si l'Universalité n'est qu'un choix parmis d'autres, alors la Specificté est aussi un choix valable et alors le contexte à forcément une importance.
shaman
CITATION(Elego @ 03 8 2008 - 14:46) *
ça rejoint un peu ce que j'ai dis dans mon précédent post : si on considère un film comme un monde à part coupé de la réalité, alors il aura prit soin de se créer une logique interne et de faire en sorte de donner du sens à son réseau de symboles en interne (et non pas en utilisant les symboles d'une époque qui renvoient à quelque chose d'extérieur au film).


La logique interne au récit, d'accord. Mais je pensais à quelque chose de plus universel, pourquoi certains genres naissent à une époque et pas à d'autres, pourquoi à un moment T le film de gangsters apparait, et pourquoi spécifiquement à cet instant il y a une demande de la part du public pour ces histoires de voyous urbains. C'est peut-être ce que certains nomment l'air du temps ?

Alors peut-être que l'expression (la forme, les codes...) d'un genre à une époque n'est plus la même à une autre, en quelque sorte sa "mythologie" se transforme pour être en adéquation avec l'époque présente. Grossièrement (qu'on me pardonne si jamais), Jesus c'est cool mais Spiderman c'est quand même un autre niveau : les mythes (universels) demeurent en se transformant ?

Elego
CITATION(shaman @ 03 8 2008 - 18:18) *
je pensais à quelque chose de plus universel, pourquoi certains genres naissent à une époque et pas à d'autres, pourquoi à un moment T le film de gangsters apparait, et pourquoi spécifiquement à cet instant il y a une demande de la part du public pour ces histoires de voyous urbains. C'est peut-être ce que certains nomment l'air du temps ?


Ah mais je suis d'accord, je trouve que c'est quelque chose de très intéressant voire passionnant, mais c'est du domaine de l'historien de cinéma (amateur ou pas), et ça n'est pas indispensable pour pouvoir juger un film (du moins pas tous, je suppose qu'il doit y avoir des cas particuliers plus ou moins injugeable actuellement autrement que par ce prisme-là).

CITATION(shaman @ 03 8 2008 - 18:18) *
Alors peut-être que l'expression (la forme, les codes...) d'un genre à une époque n'est plus la même à une autre, en quelque sorte sa "mythologie" se transforme pour être en adéquation avec l'époque présente. Grossièrement (qu'on me pardonne si jamais), Jesus c'est cool mais Spiderman c'est quand même un autre niveau : les mythes (universels) demeurent en se transformant ?


Oui, mais si à la base c'est bien fait (et si ça repose autrement que sur une signification particulière à une époque donnée), ça devrait pouvoir traverser les époques sans trop de problèmes. Par exemple, y a pas besoin de la grille de lecture "films post-11 septembre" pour pouvoir apprécier des films comme La guerre des mondes ou Les fils de l'homme, ce sont des films qui certes fonctionnent au niveau intellectuel/symboliques en phase avec leur époque, mais aussi au niveau narratif, mise en scénique et émotionnel.
Après ça peut peut-être poser un problème si certaines institutions d'une époque deviennent plus tard le symbole d'un conservatisme primaire et crétin. Mais si le spectateur qui voit ce genre de film est intelligent, il évacuera l'idée "ouh la la que c'est nul, conservateur et limite puant" par l'idée "j'accepte que ce film date d'une époque idéologiquement différente, cet aspect n'est pas le centre du film, je peux en profiter sans adhérer à cette idéologie".

@ Adinaieros, certes, chacun trouve dans l'art ce qu'il lui plaît d'y trouver smile.gif
shaman
CITATION(Elego @ 03 8 2008 - 19:19) *
Oui, mais si à la base c'est bien fait (et si ça repose autrement que sur une signification particulière à une époque donnée), ça devrait pouvoir traverser les époques sans trop de problèmes. Par exemple, y a pas besoin de la grille de lecture "films post-11 septembre" pour pouvoir apprécier des films comme La guerre des mondes ou Les fils de l'homme, ce sont des films qui certes fonctionnent au niveau intellectuel/symboliques en phase avec leur époque, mais aussi au niveau narratif, mise en scénique et émotionnel.



De l'autre côté, des chefs d'oeuvre bien faits qui fonctionnent au niveau intellect/symboliques/narratif/mes/émotionnel en passant par une approche hermétique (codes, valeurs propres à un genre, une époque - révolu ?), ça existe aussi. Je reprends le même exemple*, Hitokiri, un film populaire par excellence au récit universel doublé d'un travail fabuleux sur les codes du chambara (tiens pour te donner une meilleure idée, regarde cet extrait, je suis certain que ça correspond plus ou moins à ta vision du cinéma, et pourtant...)

Et je le répète, ces codes n'ont pas pour autant une signification intellectuelle, ils peuvent être tout aussi instinctifs et précis pour celui qui en a conscience - pour le public d'une certaine époque. Alors en quoi ces films seraient-ils mauvais ? À cause de notre ignorance ?

*Je suis sûr que chacun d'entre nous connait d'autres exemples.
Elego
CITATION(shaman @ 03 8 2008 - 20:56) *
De l'autre côté, des chefs d'oeuvre bien faits qui fonctionnent au niveau intellect/symboliques/narratif/mes/émotionnel en passant par une approche hermétique (codes, valeurs propres à un genre, une époque - révolu ?), ça existe aussi.


Si un film se contente de jouer avec les codes/valeurs/genre de son époque, j'aurais du mal à le considérer comme un bon film unsure.gif Je suis certain que ça doit être très bien à regarder quand on connaît ces codes/valeurs/genre, mais si le film ne va jamais plus loin, ne créé pas un langage interne et nécessite obligatoirement de connaître ces codes/valeurs/genre pour être apprécié, ça sera sans moi.

J'aimerais bien savoir d'ailleurs ce que tu entends par "approche hermétique", t'as des exemples en tête ? (que j'ai vu si possible, d'ailleurs j'ai pas réussi à lancer la vidéo sur ton (chouette) site)
Jouer avec les codes d'un genre ne suffira jamais pour faire un chef d'oeuvre, au mieux ça fera un film jouissif, mais je doute que ça puisse accéder au rang suprême (ça me rappelle un post sur un autre topic, ça parlait d'un court-métrage de festival spécialement pensé pour les (pauvres) spectateurs de festivals, ça devait être très rigolo en festival, mais dans l'absolu...?).

CITATION(shaman @ 03 8 2008 - 20:56) *
Et je le répète, ces codes n'ont pas pour autant une signification intellectuelle, ils peuvent être tout aussi instinctifs et précis pour celui qui en a conscience - pour le public d'une certaine époque. Alors en quoi ces films seraient-ils mauvais ? À cause de notre ignorance ?


C'est quoi que t'appelles les codes "instinctifs et précis [...] pour le public d'une certaine époque" ? Les coups de trompettes qui accompagnent des coups de poing ? Les valeurs familiales d'une époque ? La représentation de l'horreur et de la violence ?
Pour moi un film doit transcender les caractéristiques de son époque (peu importe ce qu'elles sont) pour dépasser le temps et la mode. Si un film est un "chef d'oeuvre" à une époque X, mais devient extrêmement quelconque à une époque Y, on peut se poser des questions sur pourquoi il a été considéré comme un chef d'oeuvre à l'époque X (et peut-être qu'il était le bon film à faire à cette époque, peut-être que les gens en avaient besoin, mais est-ce que ça fait de lui, dans l'absolu, un chef d'oeuvre ?).
shaman
CITATION(Elego @ 03 8 2008 - 21:54) *
Si un film se contente de jouer avec les codes/valeurs/genre de son époque, j'aurais du mal à le considérer comme un bon film unsure.gif Je suis certain que ça doit être très bien à regarder quand on connaît ces codes/valeurs/genre, mais si le film ne va jamais plus loin, ne créé pas un langage interne et nécessite obligatoirement de connaître ces codes/valeurs/genre pour être apprécié, ça sera sans moi.


Ça me semble d'autant plus paradoxal dans un contexte de production de masse où effectivement, les films de genre existaient parce qu'il y avait une audience, donc on peut bien penser que cette audience était familière avec l'univers du genre (elle avait besoin de ces films). Ainsi, ce qui nous parait hermétique aujourd'hui pouvait être, à cette époque, la sorte de clée permettant à l'audience de vivre pleinement une expérience universelle. Le genre s'impose pratiquement comme une sorte de pacte entre les artistes et l'audience, d'une époque (c'est loin d'être un simple jeu en somme).

Aujourd'hui, contexte différent, besoins différents, cette clée autrefois célébrée nous paraît parfois incompréhensible, elle est devenue hermétique - nécessitant de s'arrêter quelques instants pour la comprendre, pour rendre à nouveau l'expérience du film instinctive (donc être en communication directe avec l'oeuvre - ce qui n'a rien à voir avec l'intellect).

Des exemples, il en existe dans tous les genres, le film noir, le western, gangsters, horreur... Des chefs d'oeuvre au sens large du terme qui ont exploité les symboles du genre pour déboucher sur un récit universel - absolu. S'ils restent une expérience magique pour les initiés, ils deviennent parfois incompréhensibles pour le reste du public, ancré dans le présent ("les effets sont nuls", "les persos sont pas crédibles"... car le public est habitué à la production actuelle, celle qui lui parle directement...).

J'aimerais bien croire qu'un chef d'oeuvre est intemporel, peut-être que son essence l'est, mais son expression/sa forme sont dépendants du temps. Il faudra voir comment sera perçu d'ici 30-40ans La Guerre des Mondes & Fils de l'homme chez un public non-initié pour constater la durabilité de l'effet, j'ai beau aimé ces films, je pense sincèrement qu'ils ne diront rien à nos enfants (et c'est normal, c'est pas un produit de leur époque).

(sinon je suis d'accord avec ton approche "extrême", mais tous les jours je vois des exemples de films, des discussions qui viennent bousculer cette vision idéale, alors je m'interroge !)
Elego
Ouais, t'as peut-être raison finalement, mais je me demande si toute cette histoire de remise en contexte n'est pas finalement qu'une question de confiance dans le film qu'on regarde. Parfois j'ai l'impression que lorsque on voit un film avec des effets "ringards", on a besoin de savoir que ces effets ont marchés sur le public de l'époque et que c'était considéré comme novateur, pour simplement pouvoir accepter la ringardise de l'effet et continuer de voir le film.

Je me suis toujours dit qu'en regardant un film de période/contexte "inconnu", il suffisait d'une poignée de minutes pour se faire au style et au genre du film, pour enfin l'apprécier. Dans mon entourage, pas mal de gens sont rebutés par certains "vieux films" et semblent ne voir que l'âge du film, alors que ça fait quelques temps que je n'ai plus de mal à simplement m'intéresser à l'histoire et aux personnages unsure.gif (mais comment être sûr que ce n'est pas parce qu'en regardant d'autres films de cette époque, j'ai pu me faire à leurs "codes" ?).

Après pour ce qui est de la culture, des traditions etc., mon avis ne change pas, mais je ne sais pas trop quoi penser des code cinématographiques. C'est vrai qu'il faut s'y faire pour pouvoir réellement apprécier un film (un peu comme découvrir une autre culture ?), mais je ne pense pas que dans ce cas il faille "remettre en contexte", juste regarder plusieurs films obéissant à ces codes. Enfin je crois.



LMD
En fait je parlais de contexte historique à la base, mais au sens large, on ne voit jamais un film dans un vacuum libéré de toute influence. C'est un peu la limite de la position "faire abstraction du contexte": il y en a toujours hein. Le langage cinématographique étant une construction, avec laquelle nous sommes de plus en plus familière, notre perception est toujours dépendante, à tout le moins, de notre histoire de spectateur. La promo d'un film le "contextualise", crée et défini des attentes voire le replace dans une timeline très approximative ("par le réalisateur de... avec..." nous informant très brièvement du passé). Et de la même façon qu'il est impossible de se remettre dans la peau d'un autre, il est illusoire de croire qu'on peut recevoir un film uniquement pour ce qu'il est (le simple jugement 'subjectif' est lui même construit chez chacun à travers une histoire unique, un ordre de découverte des films qui nous est propre).

Sinon c'est bien ce que vous racontez. Continuez.
ICE_T_62
Le contexte d'une œuvre n'est pas restreint au cinéma, c'est aussi important pour la littérature (Zola, Verne, ...) ou la peinture (Picasso, les tableaux en URSS, ...) par exemple.

J'ajouterai un exemple qui n'a pas encore été cité, c'est les films d'invasion aliens en pleine guerre froide.

Bah, pour le reste, vous en parlez mieux que moi sweat.gif
shaman
CITATION(Elego @ 03 8 2008 - 23:28) *
une question de confiance dans le film qu'on regarde.


C'est comme regarder un film sans le son ou sans sous-titres, si le conteur est bon, tu vas percevoir sans problème les émotions et l'essence de l'histoire mais tu peux passer à côté de certains détails, auxquels tu n'accordes pas suffisamment d'importance parce qu'ils ne t'évoquent rien (ou ne t'intéressent pas, on est humain après tout). Si ce genre d'expérience est intéressante, ça peut aussi se révéler très rapidement frustrant quand le conteur fait (trop?) confiance à son audience et qu'une rencontre apparemment anodine entre 2 hommes se révèle être un tournant majeur (à l'exemple d'une fresque historique, d'un fait culturel - c'est peut-être pourquoi certains sombrent dans le didactisme quand il faudrait arriver à montrer l'essence même du sujet - la balance doit être difficile).

(aussi à prendre en compte, tu es passionné par le cinéma, qu'un film soit vieux, récents... il peut toujours t'apprendre quelque chose)

Mais le cinéma est suffisamment varié et étrange pour permettre à certains types de spectateurs à prendre plaisir en regardant un certains types de films, même si ceux-là - objectivement - sont pas très bons, chiants, prisonniers de leur contexte (je pense à ces films politiques avant-gardistes des années 60/70 où tout est intellectualisé). Pourtant, même si on peut trouver ça très bâtard, il y a toujours beaucoup de passionnés pour en vanter les mérites (l'aspect politico-social nihiliste...). Qui a raison, qui a tort ? (personne je crois).

Il y aura toujours des exemples pour contredire "l'inutilité" de remettre un film dans son contexte pour le comprendre, je ne crois pas que dans ce domaine il existe une vérité absolue, ça doit dépendre des films, des spectateurs (initiés ou non; de leurs goûts), de l'époque. Je constate juste ça, sans vraiment le comprendre. unsure.gif
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